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          Frédéric GIMELLO-MESPLOMB, Maître de conférences

 
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ADORNO et l'Ecole de Francfort



Introduction : Le mythe Adorno

Le 11 septembre 2003 sera fêté le centenaire de la naissance de Theodor W. Adorno, critique culturel, sociologue et musicologue. Cet anniversaire n'est pas seulement l'occasion de se remémorer la pensée de l'un des théoriciens et critiques culturels les plus influents du XXe siècle. Il est également frappant à quel point la personne d'Adorno divise encore aujourd'hui.

Theodor W. Adorno - c'est d'une part le précurseur intellectuel du mouvement de 1968, le critique brillant de l'« industrie culturelle », celui qui a mis en garde contre l'oubli des atrocités national-socialistes, l'auteur de « Minima Moralia » et de la « Dialectique de la raison » rédigée en coopération avec Max Horkheimer. Avec ce dernier, il influença au sein de l' « Institut für Sozialforschung » (Institut de Recherche Sociale) à Francfort-sur-le-Main non seulement les membres du mouvement de la « Théorie Critique », appelé plus tard « École de Francfort » mais également toute une génération d'intellectuels.

Theodor W. Adorno - c'est d'autre part cet intellectuel « Allround », comme l'écrit le « Spiegel », « dont tout étudiant en sciences humaines a dû affronter l'acte de pensée et d'écriture 'comme on vient à bout de la rougeole' (selon Odo Maquard) », « élitiste », « petit bourgeois » et « présomptueux » (Literaturen) sont d'autres attributs que l'on associe à sa pensée. « C'est vraiment devenu un exercice imposé que de se distancer de lui », affirme Elisabeth Lenk, élève d'Adorno et spécialiste de la littérature.

Qui était cet homme que Max Horkheimer qualifie de « génie » et Thomas Mann d'homme « à l'esprit revêche, exclusif et d'une intelligence presque tragique» ? De quel côté s'approche-t-on d'un homme qui était à la fois philosophe, sociologue et psychologue ainsi que musicologue, critique littéraire et - il ne faut pas l'oublier - compositeur ?

La personne d'Adorno au cour des discussions

Alors que les études critiques sur Adorno abondent, on a dû attendre le centième anniversaire du grand intellectuel allemand pour que paraisse une biographie détaillée retraçant sa vie. Cette année - plus de trente ans après sa mort - cinq ouvres biographiques sont parues simultanément. Adorno est dès lors au cour des discussions, surtout en tant que personne. C'est lui, plus que ses écrits théoriques, qui semble diviser la postérité. Son élévation au rang de « dernier génie » - d'après le sous-titre de la biographie de son élève Detlev Claussen - s'oppose aux tentatives de retourner contre lui les contradictions entre ses théories critiques et son existence bourgeoise.

Enfance protégée à Francfort-sur-le-Main

Theodor Ludwig Wiesengrund-Adorno - ce n'est qu'en 1938 pendant son exil américain qu'il adopta le nom de Theodor W. Adorno-, fils d'un grossiste en vin juif converti au protestantisme et d'une chanteuse, grandit dans une « atmosphère entièrement dominée par les intérêts théoriques (politiques aussi) et artistiques, avant tout musicaux » (Thomas Mann). En 1931 après des études en philosophie, musicologie, psychologie, sociologie et composition musicale, il passe son doctorat de philosophie et entre à l'Université de Francfort comme chargé de cours.

Deux ans plus tard cependant, les nazis lui retirent le droit d'enseigner. Il tente alors de s'installer à Oxford en Angleterre pour ensuite émigrer aux Etats-Unis en 1938 grâce au soutien de Max Horkheimer. Il est là-bas membre de l' « Institut für Sozialforschung » qui a également déménagé aux Etats-Unis. La « Dialectique de la raison » voit le jour.

Dialectique de la raison

En présence du fascisme, de l'antisémitisme, du stalinisme et de la Deuxième Guerre mondiale, en présence également de l'usine à rêves d'Hollywood et de l'industrie des loisirs américaine, Adorno et Horkheimer rédigent ce texte fondamental de la « Théorie critique ». Son thème central est l' « autodestruction de la raison » : la rationalité en pleine expansion, censée libérer l'homme de son immaturité, de son emprisonnement dans le mythe, démolit certes les certitudes de l'interprétation mythologique de l'univers. Mais elle les remplace par une rationalité systémique, formalisée et scientiste qui gouverne tout. La marche triomphale de la raison mène à son inverse : la raison devient un instrument de domination. « La raison se retourne en mythologie », comme l'écrivent Adorno et Horkheimer.

Précurseur de 1968

Lorsqu'Adorno revient, au début des années 1950, dans le Francfort de la reconstruction et du miracle économique, ses thèmes sont d'une actualité brûlante. La force de rayonnement émanant de l'École de Francfort ne se limite pas au champ de la sociologie. Pour de nombreux jeunes allemands, elle offre bien plutôt « une possibilité d'identification intégrale, un programme intellectuel du sens de la vie, un environnement », comme le souligne Lorenz Jäger dans sa biographie d'Adorno.

Les textes d'Adorno « Que signifie : faire face au passé ? » et « L'Éducation après Auschwitz », parus tous les deux en 1959, annoncent en quelque sorte la confrontation intellectuelle avec le passé national-socialiste allemand et sont repris avec euphorie par le mouvement étudiant.

Cependant, le grand critique qui a appelé à la résistance dans ses cours, se retrouve finalement face à ceux qui ont pris ses discours au pied de la lettre. Il fait figure « d'apprenti sorcier qui n'est plus maître des forces élémentaires qu'il a déclenchées » (Lorenz Jäger). Bientôt, les cours d'Adorno deviennent la scène d'actions étudiantes dont l'apogée est l'occupation de l' « Institut für Sozialforschung » en janvier 1969. Adorno fait vider le bâtiment par la police et porte plainte pour violation de domicile. Il décède le 6 août de la même année d'un infarctus lors de vacances en Suisse.