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          Frédéric GIMELLO-MESPLOMB, Maître de conférences

 
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Germaine Dulac (1882-1942)


  • Le temps est venu, je crois, d'écouter en silence notre chant, de chercher à exprimer notre vision personnelle, de définir notre sensibilité, de tracer notre propre voie. (1919)
  • Mouvement, évolution, rythme, vérité, subtilité, logique, captation de l'insaisissable. le cinéma a bien sa place à lui dans le domaine intellectuel, en dehors de toutes les formes d'art connues. (1925)
  • (...) il faut nous aider à libérer le cinéma de ses entraves et créer le cinéma pur. (1925)
  • Dans son cadre visuel le cinéma n'a pas de limites. (1931)
  • L'actualité rompt les barrières; elle doit être indiscrète et vraie et renseigner sans littérature, exactement. (1934)
  • L'oeuvre cinématographique est terminée quand le spectacle commence. (1937)


L'une des dernières photographies de Germaine Dulac (vers 1940-1942)

" Quand, voilà trente ans, les frères Lumière eurent mis au point leur découverte scientifique de la captation de la vie dans son mouvement, tout le monde s'inclina devant l'invention mécanique. On la perfectionna, on s'y intéressa. Le cinématographe put facilement s'imposer en tant qu'instrument de précision. Quand de longues années plus tard, des artistes, des manieurs de pensées découvrirent que le cinéma avait, si j'ose dire, une âme, un sens intellectuel qui lui permettait de sortir du domaine scientifique pour entrer dans celui de l'art avec des forces et des formes inconnues, la tradition s'émut ". Ecrit Germaine Dulac dans La Fronde en septembre 1926, elle a 44 ans.

 

Née Germaine Saisset-Schneider, à Amiens le 17 novembre 1882, dans une famille bourgeoise de militaires et d'industriels. Elle passe la plus grande partie de son adolescence à Paris. En 1905, elle épouse Albert Dulac mais divorce en 1920 tout en gardant le nom de celui-ci. En 1909, elle commence à travailler comme journaliste. Elle tient des chroniques théâtrales et brosse des portraits de femmes célèbres dans le journal féministe de Marguerite Durand La Fronde . Elle écrit des pièces de théâtre dont certaines seront montées.

Quand la tragédie guerrière de 1914 emmène les hommes loin de leurs activités habituelles, un besoin de main d'ouvre en tout domaines permet aux femmes d'occuper de nouveaux territoires. C'est pendant cette période que Germaine Dulac, entraînée par une amie, Stacia de Napierkowska, sur un lieu de tournage dans les studios de cinéma de Rome, découvre sa passion pour cette nouvelle forme d'expression : " s'il m'était donné de pouvoir étudier et appliquer les moyens dont dispose cet art tout neuf, j'arriverais à extérioriser mon idéal artistique ".

C'est donc, comme elle le dit elle-même, hésitante, tâtonnante qu'elle tourne ses premiers films. Ces essais ne la satisfont pas complètement et bientôt elle comprend que le cinéma n'est pas une machine à faire gagner de l'argent mais peut devenir un grand art, celui qui saura exprimer, selon elle, le plus complètement l'époque dans laquelle elle vit.

Alors que le cinéma a longtemps été considéré comme un divertissement mineur, bon pour les publics de fête foraine, elle, le prend au sérieux : " par l'image seulement, je peux exprimer toute ma pensée ". " au-delà des faits précis et des évènements, l'atmosphère est un facteur d'émotion ; la valeur sensible du film réside moins dans l'action que dans la subtilité qui s'en dégage ". Elle ajoute : " Si l'expression d'un interprète vaut évidemment en soi, elle ne peut atteindre sa complète intensité que par un jeu d'images complémentaires venant en réaction. Lumière, pose d'appareil, importance du montage m'apparaissent comme des éléments plus capitaux que le travail d'une scène uniquement jouée selon les lois dramatiques ". Pour illustrer son point de vue on peut la citer quand elle parle d'une scène qu'elle a relevée dans un film qu'elle vient de voir, La Veuve Joyeuse, " Le Prince Mirko convoite la fortune de la veuve joyeuse. Au cours d'un bal, il fixe la jeune femme. La figure de celle-ci se font dans l'écran, disparaît et seuls, indiquent ce que fut le contour de sa physionomie, les joyaux resplendissants et lumineux suspendus à ses oreilles ".

Son intérêt pour le cinéma est progressif et, en 1916, elle réalise son premier film Les Soeurs Ennemies . Après quelques réalisations mineures, elle fait, en 1919, la rencontre déterminante de Louis Delluc dont elle met en scène le scénario La Fête Espagnole . Suivront une vingtaine de films : de La Souriante Madame Beudet , sans doute son oeuvre la plus réussie, à La Coquille et le Clergyman, d'après le scénario D'Antonin Artaud, auquel s'opposeront les surréalistes. Le film sort au studio des Ursulines, haut lieu de l'avant-garde cinématographique, le 9 février 1928, dans un chahut organisé par les amis d'Artaud insatisfait par la manière dont Germaine Dulac a traité son sujet.

Son chef-d'oeuvre, La souriante Madame Beudet (1923) d'après une pièce de André Obey et Denis Amiel est perçu comme une virulente critique du mariage bourgeois. Alors que la pièce est une histoire d'adultère tout à fait classique, vue du point de vue du mari, Germaine Dulac, elle, construit son film du point de vue de la femme. Dans un texte resté inédit, elle en dit ceci : " Drame très simple, âpre, de la vie courante, c'est-à-dire l' asphyxie quotidienne, duel intime d'un mari, banal comme un mari provincial médiocre et de sa jeune femme, cérébrale, que la lecture des poèmes laboure et élève. Drame de toutes les destinées avortées, complainte d'une vie perdue ".

Germaine Dulac dépeinte en 1923 par une journaliste : " Grande, brune, les traits virils et bien dessinés, des yeux noirs d'un éclat insoutenables, les épaules larges, les gestes francs énergiques, une voix chaude et prenante au timbre extraordinairement harmonieux, il émane d'elle je ne sais qu'elle force mystérieuse qui vous emporte par delà les contingences banales, vous élève au-dessus de la vie" [...]

En 1928-29, Germaine Dulac réalise trois études rythmiques dans la veine du cinéma non narratif qui concluent sa période comme metteur en scène. En 1930, elle entre dans la presse filmée et devient directrice des Actualités Gaumont et ce jusqu'à la guerre de 1940. Malade, elle meurt très discrètement, et pratiquement oubliée, en 1942. Elle laisse de nombreux textes théoriques qui ne seront publiés, pour la première fois, qu'en 1994. Les écrits épars de Germaine Dulac ne firent jamais de son vivant l'objet d'un recueil, même si, semble-t-il, son assistante et amie, Marie-Anne Malleville, avait conçu le projet d'un "Mémorial Germaine Dulac" qui eût rendu justice à son originalité. La Cinémathèque française reprit plus tard ce projet, mais c'est soixante-dix ans après qu'il aboutit, à l'initiative des éditions Paris Expérimental.

Parallèlement à sa carrière de cinéaste, Germaine Dulac a mené une activité inlassable sur tous les fronts du cinéma. En tout premier, par ses articles théoriques qui la mettent aux côtés de Louis Delluc et de Jean Epstein. Puis, par un engagement corporatif à la tête de différents organismes cinématographiques tels que la Société des Auteurs. Elle participe à l'apparition et au développement du mouvement des Ciné-clubs (elle sera présidente de la Fédération Française des Ciné-Clubs), s'intéresse à la dimension éducative du cinéma et soutient l'idée de la création d'une Cinémathèque. Il ne faut pas non plus oublier la féministe et la socialiste, qui se bat pour la place de la femme dans la société, en particulier sur la question du droit de vote.

sources :

- Paris Féministe mars 1995 N°167
- Dossier A.R.C.L. " Germaine Dulac "
- Le XXè Siècle des femmes de Florence Montreynaud éditions Nathan
- Femmes cinéastes ou le triomphe de la volonté de Charles Ford éditions Denoêl Gonthier 1972
- Paris Expérimental, présentation de la première édition des "Ecrits sur le cinéma" de Germaine Dulac (1994)