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          Frédéric GIMELLO-MESPLOMB, Maître de conférences

 
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À propos de l'IRCAM : avatars d'une critique culturelle


par Jean-Baptiste Barrière


revue CIRCUIT, vol. 10, n° 2 (1999) · ISSN 1488-9692 

BORN, Georgina (1995), Rationalizing Culture, IRCAM, Boulez, and the Institutionalization of the Musical Avant-Garde , Berkeley-Los Angeles-Londres, University of California Press, 390 p.

 

Résumé

Trois auteurs font la recension d'ouvrages récents qui traitent de différents aspects de la création musicale contemporaine: un Festschrift en hommage au compositeur d'origine suédoise Bengt Hambraeus à l'occasion de son soixante-dixième anniversaire de naissance (P. Broman et al., dir.) ; un essai consacré à la politique de soutien de la musique contemporaine en France, et plus particulièrement à l'évolution du concept de « recherche musicale » (Veitl) ; une attaque vigoureuse et ouvertement polémique de l'Institut de Recherche et de Coordination Acoustique-Musique de Paris (G. Born), à laquelle répond avec tout autant de passion un acteur important de l'histoire de cette institution (Barrière).

_____________________________________________

 

Rationalizing culture , ouvrage de Georgina Born, universitaire et musicienne britannique née en 1955, se présente comme une étude anthropologique et une critique culturelle d'une institution musicale, l'Institut de Recherche et de Coordination Acoustique-Musique (l'IRCAM) de Paris, réalisée à partir d'une immersion sur le terrain pendant six mois en 1984. Publiée en 1995, soit plus de dix ans après, cette thèse, dans le double sens du mot, propose à travers près de 400 pages compactes et denses, ni plus ni moins, comme l'indique le sous-titre, qu'une réflexion sur l'institutionnalisation de l'avant-garde[  1  ].

Un ouvrage courageux mais biaisé

Tout d'abord, le projet de Georgina Born -- une étude de type anthropologique d'un objet aussi complexe et sans réel équivalent que l'IRCAM --, quoique très ambitieux, était parfaitement fondé. Là où le bât blesse, c'est que l'entreprise était au départ biaisée : elle avait déjà son idée dès le départ, et son ouvrage n'est de ce point de vue qu'une tentative de démonstration, par ailleurs souvent assez laborieuse, d'un agenda préalable à l'étude sur le terrain. Comme elle le dit elle-même dans l'introduction : «  I was drawn by the idea of making a study of such a high-profile and "progressive" contemporary music institution and trying to work out whether my earlier intuitions about the institutions of serious music were accurate, and if so, why [  2  ]. » Qu'elle ait donc trouvé à l'IRCAM matière à illustrer sa thèse, en ignorant le reste, c'est-à-dire tout ce qui ne servait pas cette perspective (la prise en compte précise et objective du contexte musical et technique, la confrontation avec les expériences institutionnelles comparables, le devenir de l'institution, etc.) n'a donc dès lors rien de surprenant, mais limite définitivement la portée intellectuelle de l'entreprise.

Georgina Born appartient à un univers culturel précis, ce qu'elle revendique, soit celui de la scène musicale indépendante britannique, résolument gauchiste, qui favorise l'improvisation musicale et, de manière générale, entretient une saine méfiance à l'égard de tout système et de toute forme de contraintes (sociales, culturelles, artistiques, économiques, etc.). Quand elle arrive à l'IRCAM, elle entreprend donc un parcours initiatique qui la place devant tout ce qu'elle rejette et, selon moi, elle échafaude alors une argumentation intellectuelle et idéologique pour justifier ce rejet. Son aventure humaine était difficile et risquée ; elle commande sympathie et respect. Son entreprise intellectuelle, en revanche, ne pourrait être validée qu'en y regardant de plus près.

Quel est, en résumé, le constat tel qu'il apparaît à la lecture du livre? L'IRCAM serait une entreprise fondée sur l'utopie moderniste de la conjonction entre l'art et la science, mais qui maintient les clivages traditionnels conservateurs, typiquement continentaux, comme on dit au Royaume-Uni, de partage du travail entre scientifiques et artistes. Les processus de légitimation y sont d'ordre idéologiques, ultrapersonnalisés (par conséquent non démocratiques), concentrés dans (et représentés par) la figure emblématique de Boulez ou de ses émules et serviteurs, inféodés idéologiquement. Les corps intermédiaires que constituent les assistants musicaux ne sont pas reconnus pour leur travail de création. C'est pourtant ce travail qui fait éclater les barrières traditionnelles, et qui devrait ultimement amener à la question suivante : Qui est le véritable compositeur d'une oeuvre? Enfin, la technologie, principal vecteur de l'institution, n'est pas maîtrisée par les indigènes (les Français). Seuls les Américains, qui l'ont développée, en sont capables. Le résultat est un chaos total, organisationnel autant que technique, qui vaut comme contre-démonstration de tout ce que l'IRCAM prétend être : un modèle d'institution culturelle au service du discours progressiste et élitiste de la modernité.

Problèmes de méthodes

En marge de la discussion idéologique, il me paraît indispensable de souligner un certain nombre de problèmes méthodologiques. Le présent de la narration dans le livre est éternel : ce qui est, semble avoir toujours été et devoir toujours être dans le futur, comme un état immanent de l'institution. Cela est un peu sommaire : l'IRCAM a connu de nombreuses mutations, qui valent déjà comme symptômes de la reconnaissance implicite d'un incessant besoin d'améliorer sa structure, de chercher de meilleurs modèles, mieux adaptés à des missions elles-mêmes en constante évolution. On peut y voir une crise permanente, mais elle n'est pas nécessairement destructrice. Je dirais même qu'elle me semble productrice de l'institution elle-même, ce que Boulez n'a jamais renié, allant jusqu'à théoriser la nécessité d'un certain chaos. Toute institution, si elle ne veut pas disparaître, doit évoluer. A fortiori dans une institution dont le moteur est la création et, qui plus est, une création en interaction avec la recherche scientifique et les nouvelles technologies. L'IRCAM a évolué, et partant, a fait évoluer ses missions initiales. L'IRCAM de 1984 n'était pas celui de 1969 lorsque Georges Pompidou donna mission à Pierre Boulez de concevoir une dimension musicale pour le Centre Beaubourg ; ni celui de 1978, à l'ouverture du bâtiment et de l'Espace de Projection ; non plus celui de 1980, après le départ des pionniers (Luciano Berio, Jean-Claude Risset, Vinko Globokar, Michel Decoust) ; pas celui de 1986, avec l'arrivée de Laurent Bayle à la direction artistique, puis à la direction générale lors du départ de Boulez en 1992 ; ni celui de 1998, alors que l'on compte par centaines les utilisateurs dans le monde de ses logiciels et que se multiplient les collaborations artistiques, par exemple avec le festival de Salzburg ou les Bouffes du Nord. L'IRCAM de 1984 n'est sûrement pas celui de l'an 2000, à redéfinir, et ainsi de suite ad infinitum. Réduire l'IRCAM à un seul moment de cette trajectoire, fut-il exemplaire, n'est pas acceptable en comparaison des objectifs et des ambitions du livre. Pour rendre justice à l'IRCAM, il était tout à fait indispensable de capter l'évolution et les mutations successives, plutôt que de procéder par généralisations abusives à partir d'un moment pourtant reconnu comme transitoire.

À ce titre, il est regrettable que l'auteure, pour essayer de se dédouaner par avance de cette critique, tente un replâtrage un peu forcé dans la conclusion. Elle y propose une mise à jour de l'état des choses au début des années quatre-vingt-dix, encore plus discutable du point de vue méthodologique car fatalement sommaire. Elle y concède certes quelques changements, mais aboutit à un même diagnostic : sur le fond, rien n'aurait changé.

Pierre Boulez, dont le nom figure dans le titre[  3  ], n'a jamais été interrogé par l'auteure. Ce qu'elle justifie de manière totalement ambiguë et insatisfaisante par une volonté de « maintenir sa neutralité » [sic] à son propos (p. 9). Le livre ne porte d'ailleurs à aucun moment sur Boulez, mais seulement sur son influence, terrain miné tant il laisse de place à l'interprétation. Le procès a lieu, mais le coupable désigné n'est jamais convoqué, n'a jamais la parole, sauf à travers des citations de ses écrits « programmatiques ». Pas d'habeas corpus pour le suspect Boulez!

Qu'en revanche, Georgina Born ait jugé nécessaire d'interroger le plus grand nombre possible d'acteurs de l'IRCAM n'est pas discutable méthodologiquement. C'était même tout à fait souhaitable. Qu'elle se refuse à établir une hiérarchie dans la teneur et la crédibilité des témoignages est, d'un point de vue sociologique, parfaitement admissible, même si cette pseudo-neutralité se révèle complètement artificielle. Cependant, comment ne pas ressentir un certain malaise devant la naïveté, non pas tellement de certains propos rapportés, mais de leur mise en scène emphatique, censée être hautement significative. Informations brutes et rumeurs, états d'âme et commentaires peu amènes, conditionnés par toutes sortes de frustrations (peut-être par ailleurs parfaitement justifiées et compréhensibles), sont ici assimilés d'une manière irrecevable. Car il manque à tout cela une mise en perspective qui permettrait de les évaluer avec une nécessaire sérénité.

Quant aux réalisations musicales, qui constituent pourtant la raison d'être de l'IRCAM, il n'en est jamais question. On ne trouve dans l'ouvrage ni analyse musicale (ou bien même technique) ni discussion esthétique. C'est pourtant le travail des compositeurs, leur usage, conséquent ou non, de la technologie sur le plan musical, qui représenterait la forme d'évaluation la plus légitime de l'existence et de l'activité de l'IRCAM. Il ne me paraît pas suffisant de se « protéger » en affirmant que ce livre ne se veut une thèse ni d'esthétique ni de musicologie, dès lors qu'il apparaît clairement, à travers toutes sortes d'indices, qu'il y a bien un « agenda » qui conditionne la critique, et que celui-ci est bien d'ordre idéologique. Il est aussi problématique qu'éléments de critiques et jugements se retrouvent disséminés dans le texte, apparaissant indûment comme conséquences de la démonstration, plutôt que séparés et présentés en tant que commentaires. Comme trop souvent dans les cultural studies qui ont envahi l'anthropologie anglo-saxonne, prise de position personnelle et engagement idéologique se sont substitués à tout effort d'objectivité. Et même du strict point de vue de la critique culturelle, l'analyse qui est faite de l'opposition entre modernité et postmodernité se révèle beaucoup trop sommaire. Le modernisme est caricaturé comme fondamentalement idéologique, alors que, dans le même temps, tout ce qui n'est pas modernisme se trouve assimilé au postmodernisme sans distinction aucune, uniquement parce qu'il apparaît à tel moment de la chronologie.

Il est à la fois symptomatique et regrettable qu'aucune comparaison, même sommaire, n'ait été tentée avec le Center for Computer Research in Music and Acoustics (le CCRMA, dirigé alors par le compositeur John Chowning) de l'Université de Stanford, ou avec le Media Laboratory du Massachussets Institute of Technology (MIT), fondé en 1984, véritable Mecque de la technologie qui prend littéralement l'art comme prétexte à la technologie, sans « obligation de résultats » artistiques, mais avec beaucoup plus de moyens et de tapage médiatique que l'IRCAM. L'IRCAM est né d'un transfert de technologies et de connaissances du CCRMA. Il aurait été légitime de comparer l'organisation et le fonctionnement du centre et ceux de l'IRCAM. On aurait alors remarqué dans les deux cas -- et pour cause -- le même type de problèmes tant de mise en oeuvre de la technologie que d'accès à celle-ci, puisqu'il n'y avait aucune gestion transparente ou démocratique quant au choix des compositeurs invités à y travailler. Enfin, la question de la relation assistant-compositeur aurait été caduque, puisque aucun système d'assistanat n'existait au départ, et que les outils de l'époque n'étaient ni conviviaux ni accessibles à des non-experts, ce qui condamnait les compositeurs qui désiraient recourir aux moyens technologiques en question, à développer de réelles compétences en informatique.

Une analyse plus approfondie aurait montré que l'IRCAM a permis à toutes sortes de compositeurs qui n'auraient pas eu autrement accès à la technologie de réaliser des oeuvres et de proposer des pistes musicales plus ouvertes et différenciées que celles, très normatives, développées alors dans les studios des universités américaines. Le modèle anglo-saxon, dans le même temps, reposait sur une vision positiviste, voire sur la promotion d'un modèle artistico-épistémologique pour le moins discutable, celui de l'ingénieur-artiste destiné à remplacer l'artiste techniquement incompétent et par conséquent socialement dépassé. Et si, quinze années après le devenir des technologies développées ici et là, on faisait le bilan, il apparaîtrait assez clairement que les outils logiciels développés à l'IRCAM ont connu et connaissent actuellement une plus large distribution que ceux développés au CCRMA, pourtant au coeur de la Silicon Valley. Et que dire de la diffusion dont jouissent les oeuvres produites dans les deux institutions, elle ne se compare vraiment pas...

Un mot sur l'anonymat des « acteurs » du livre. Chaque personne est désignée par un acronyme censé protéger la source d'information. Principe discutable mais compréhensible, cependant mis en oeuvre de manière incomplète : mon personnage-avatar (nom de code : WOW) se voit attribué la paternité d'une oeuvre dont le titre réel (Chréode I) est mentionné clairement, sans transformation, ce qui pourtant n'apporte aucune information pertinente. Les personnes sont présentées par leur fonction. Il n'est donc que trop facile, dans l'essentiel des cas, de les identifier par recoupements, par exemple à l'aide des rapports d'activités annuels, largement disponibles. Il s'agit encore une fois d'une revendication de scientificité, d'autant moins inopérante que la publication intervient plus de dix années après les faits et que la plupart des protagonistes ont quitté l'IRCAM et/ou sont passés à autre chose. Si ce principe de l'anonymat pouvait se comprendre au moment de la rédaction de la thèse, car il satisfaisait à une règle universitaire, cela devient, au moment de la publication du livre, inutile voire irritant, et même éthiquement problématique en raison du manque de transparence.

Enfin, sur la base de certaines scènes, relatées dans le livre, auxquelles j'ai moi-même participé de manière active ou non, j'en suis venu à me demander, après de longues réflexions, si nous ne sommes pas tout simplement en présence d'un réel problème de compétence linguistique : le français de Georgina Born lui aurait tout simplement fait défaut, ce qui l'aurait amenée à interpréter trop librement certaines situations, pour ne pas dire plus. De ces moments, je n'ai pas du tout les mêmes souvenirs, ce qui est normal, mais certainement pas à ce point. J'ai toujours parlé en anglais avec elle et je n'ai pas souvenir qu'elle ait témoigné d'une agilité particulière dans notre langue, laquelle, malgré la forte population internationale de l'institut, restait quand même la langue véhiculaire dans les réunions, sinon dans les relations de personne à personne.

Politiques artistiques

Venons en maintenant aux problèmes de fond qu'il ne saurait être question d'éluder.

La politique artistique tout d'abord. Il y a confusion à ce sujet, dans le livre, entre plusieurs phénomènes d'ordre différent. Tout d'abord, comment s'étonner, sans fausse naïveté, qu'une institution culturelle puisse avoir une direction artistique? On peut bien sûr ne pas être d'accord avec les axes qu'elle choisit de privilégier, mais on ne peut lui reprocher d'en avoir. Discourir sur les processus de légitimation dans le domaine artistique est inconstestablement une problématique riche et pertinente, mais elle ne débouche ici sur aucune analyse nouvelle et convaincante, car elle en reste encore une fois à un niveau idéologique et ne réussit pas, par conséquent, à cerner les véritables raisons de fond.

Pourquoi l'IRCAM aurait-elle dû prétendre couvrir tout le champ musical, ratisser large et prétendre, fatalement de manière démagogique, représenter toutes les tendances? Avoir une vision artistique forte, la défendre, sans pour autant dénigrer d'autres approches, cela n'est-il pas la seule légitimité possible dans le domaine de l'art? Voilà ce dans quoi s'égarent tant « d'ingénieurs culturels », effrayés par le terrorisme idéologique d'une certaine critique qui règne actuellement, et par l'idée de prendre des risques et d'être désavoués par l'intelligentsia et/ou le public. Il faut aussi rappeler que, déjà en 1984, l'IRCAM s'était doté d'un canal démocratique qui venait contrebalancer le caractère arbitraire de la direction artistique : un comité de lecture composé de membres indépendants (compositeurs, interprètes, musicologues et acteurs de la vie musicale internationale) et renouvelé chaque année.

De plus, l'affirmation d'une orientation artistique ne doit pas être confondue avec l'assimilation à une école artistique. De fait, l'IRCAM n'a jamais été une école, ni même été tenté d'en constituer une. Boulez avait cette idée en horreur. Pas plus en 1984 qu'aujourd'hui ne trouverait-on à l'IRCAM davantage de disciples de Boulez et du postsérialisme que de représentants d'autres esthétiques. La diversité de styles des compositeurs qui travaillaient au cours de cette période le montre indéniablement : Morton Subotnick, Gérard Grisey, Alejandro Vinao, Jonathan Harvey, Tod Machover, Marco Stroppa, Philippe Manoury, Tristan Murail, Kaija Saariaho, Roger Reynolds, etc. La véritable question, celle qui définit la démarcation entre les compositeurs travaillant à l'IRCAM et les autres, se trouve ailleurs : dans le choix des projets de recherche, des problématiques abordées, dans les outils qui en découlent et, par conséquent, qui peuvent intéresser les compositeurs au point de vue musical.

Quelle que soit l'importance des moyens dont dispose l'IRCAM ou toute autre structure, on ne peut jamais tout faire, tout aborder et tout traiter. Il est donc normal que les orientations artistiques et scientifiques de cet institut aient fait en sorte que certains thèmes aient été privilégiés, normal que certaines problématiques de recherche et de développement aient conditionné certaines problématiques musicales. Et réciproquement. Celles-ci furent toujours, pour des raisons évidentes, définies en complémentarité, et non en concurrence, avec l'industrie. Actuellement, on doit d'ailleurs choisir une fois de plus entre différentes problématiques, cette fois pour des raisons particulières qui reposent sur le dilemme suivant : maintenir l'héritage du passé, devenu progressivement un poids qui asphyxie les autres domaines, ou favoriser l'innovation et l'émergence de nouveaux thèmes. Le coût de l'entretien des logiciels existants freine les possibilités de développement de nouveaux concepts et de nouvelles approches. Le thème essentiel de recherche en cette année 1984 était le temps réel. Et il était justifié, d'une part, par le fait qu'aucune autre institution ne s'y intéressait ou n'avait les moyens de le faire de manière conséquente ; d'autre part, et surtout, parce qu'il permettait d'établir une continuité entre l'univers instrumental traditionnel et les nouveaux matériaux sonores produits avec l'ordinateur. Max, le logiciel de contrôle développé à l'IRCAM dans ce concept -- par un Américain, Miller Puckette! --, reste aujourd'hui encore le logiciel le plus utilisé dans ce domaine dans le monde. Et de manière générale, l'expérience accumulée se révèle sans équivalent, et trouve aujourd'hui des applications renouvelées et multiples dans les domaines de l'interactivité et de la réalité virtuelle.

Georgina Born critique aussi le fait que des compositeurs de pop music n'aient pu venir travailler à l'IRCAM. Là aussi, il faut comprendre les obstacles pratiques plus qu'esthétiques qui s'opposaient à de telles collaborations. La pop music repose sur des logiques de production différentes, notamment dans la gestion du temps investi, mais aussi dans les techniques de mise en oeuvre. Stevie Wonder ou Peter Gabriel n'ont jamais été bannis de l'IRCAM, loin s'en faut. Ils n'y auraient pas nécessairement trouvé, comme ce fut le cas par exemple avec Frank Zappa, de matières et de méthodes propres à les satisfaire, en tout cas dans le laps de temps qu'ils auraient été prêts à y investir. Et pourquoi aurait-il fallu que ce soit absolument le cas? N'est-il pas exorbitant de demander que l'on séduise et satisfasse tout le monde? Comme d'ailleurs de vouloir que tout le monde soit séduit? Pourquoi aurait-il fallu que l'IRCAM cherche à concurrencer l'industrie sur son propre terrain, alors que, de toute évidence, la logique de la complémentarité était plus satisfaisante et tout simplement plus efficace ; en tout état de cause, plus légitime? Il y a là encore inconséquence : on critique l'effort d'universalisme sur le plan méthodologique et on reproche à l'institution de ne pas servir tout le monde. Mais que Georgina Born se rassure : grâce aux efforts continus de développement et aux systèmes informatiques personnels (dont elle décrit amplement l'entrée difficile à l'IRCAM), de nombreux compositeurs de pop music, comme d'ailleurs de tous styles, peuvent enfin utiliser librement, chez eux ou ailleurs, les logiciels de l'IRCAM.

Évoquons maintenant la question de la relation entre compositeurs et assistants. Certes l'idée musicale n'est pas tout, et la réalisation fait dans beaucoup de cas la différence. La question dépasse largement le champ de la musique et s'appliquerait de manière beaucoup plus sensible au cinéma par exemple. Imaginons le cas d'un compositeur plus âgé et n'ayant pas le temps et les moyens de commencer une formation nécessitant un investissement important. S'il avait un projet musical d'envergure qui fait appel à la technologie, et qu'il ne pouvait le réaliser seul, faudrait-il lui interdire de collaborer avec des chercheurs et/ou des assistants musicaux qui lui permettraient de le mener à bien[  4  ]?

En tout état de cause, l'IRCAM a toujours été sensible à l'identification des responsabilités de chacun, et a particulièrement veillé à les établir clairement dans les affiches et les notes de programme. De plus, avec le temps, le problème s'est largement estompé et déplacé : l'IRCAM a, de manière intensive, investi dans une large gamme de processus de formation afin de permettre aux compositeurs de mieux maîtriser par eux-mêmes la technologie. Certaines institutions pédagogiques ont pris le relais. Enfin, les compositeurs ont de plus en plus facilement accès, y compris chez eux, aux outils informatiques, et peuvent prendre plus de temps pour les maîtriser et expérimenter. La relation avec l'assistant, comme d'ailleurs avec l'institution, a donc changé et s'appuie la plupart du temps sur un contrat plus équilibré : l'assistant permet au compositeur de bénéficier de compétences étendues et, surtout, de se dégager des problèmes techniques ; par conséquent, de se concentrer sur les décisions d'ordre purement musical.

Si le problème de l'assistanat se pose, il n'est pas relatif à l'identification du compositeur de l'oeuvre, ce problème se résout somme toute très bien, mais bien au statut social de l'assistant. Qu'un artiste se nourrisse de processus d'influences et de recours à des compétences diversifiées, il n'y a rien là que de très naturel. Il ne faudrait pas négliger le fait que, dans cette relation, l'assistant, en contact avec d'autres problématiques et méthodes que les siennes, apprend beaucoup et s'enrichit de l'expérience des compositeurs avec qui il travaille. La question est donc plutôt de savoir si ce statut doit être institutionnalisé et ce, pendant plus qu'une période limitée dans le temps. Je ne crois pas que cela soit sain pour un compositeur, car passée la période d'apprentissage, sauf exceptions notables, cela risque de générer frustrations, voire schizophrénie. C'est pourquoi j'ai personnellement poussé l'idée de distinguer deux types opératoires d'assistants : des assistants techniciens professionnels et permanents, à la formation d'abord scientifique mais possédant un bon niveau musical, et des assistants-compositeurs, pour qui l'assistanat représenterait une étape enrichissante dans le processus de formation, forcément limitée temporellement. Là aussi l'IRCAM a conçu et mis en oeuvre des formations capables de répondre à ces besoins, qui permettent de mieux valoriser les ressources humaines des assistants et, par le fait même, de l'institution.

De l'usage de ce livre...

Enfin, il n'est peut-être pas inutile de se pencher sur l'utilisation que feront du livre certains intellectuels, personnages politiques et musiciens, principalement anglo-saxons. L'auteure ne peut pas en être incriminée, mais elle devra assumer en tout état de cause une certaine responsabilité quant aux conséquences de ses propos. Dans cette perspective, la thèse véhiculée par le livre constitue indéniablement un mauvais coup pour toutes sortes d'intervenants et d'organismes culturels. La récupération qui en a été faite -- et qui va, selon le degré dans la négativité, d'une méfiance prudente à un rejet hystérique -- est aussi éloquente que le propos du livre prétend l'être. Ne nous y trompons pas : ce livre sert de justification théorique à tous ceux qui ont des comptes à régler avec Boulez, la musique contemporaine, le principe même du soutien de l'État à la culture, et même, dans la foulée, avec une certaine idée de la France, stigmatisée par toutes sortes de clichés latents dans le texte et dans les propos des commentateurs. Il suffit de lire les citations en dernière page de couverture, toutes empruntées, comme par hasard, à des auteurs anglo-saxons, pour comprendre que les enjeux dépassent de loin le simple discours de type anthropologique.

Descending from the abstract spheres of metapolemic, this ethnography shows what can be learned from an in-depth study of a remarkable cultural institution. Here, the battles over serialism in music versus postserialism, over the influence of American culture and technique on the french, over High culture and low culture, -- in a word, over modernity versus postmodernity -- are described in detail as practical struggle -- [  5  ] .

Cela n'est pas digne d'une démarche intellectuelle qui s'exerce en toute indépendance. Il serait passionnant et certainement éclairant de renverser la perspective et de procéder à une analyse similaire du livre, de son auteure, de ses commentateurs et de leurs commentaires, du contexte social, idéologique voire politique dans lequel s'inscrit cette entreprise intellectuelle et sa réception par son public.

Autre contradiction édifiante par ses attendus : dans le corps du livre (rédigé, rappelons-le, en 1984), on reproche à l'IRCAM d'avoir fait appel à des compositeurs renommés, puis dans la conclusion (en 1990), on diagnostique une perte de prestige pour l'institution, due à la présence d'un certain nombre de jeunes compositeurs français, forcément peu connus à l'extérieur de l'Hexagone. La critique culturelle repose ici sur des positions beaucoup trop géo-déterminées, qui renvoient à des valeurs pour le moins attristantes.

J'ai eu l'occasion de constater comment ce livre peut devenir une arme pour tous ceux qui souhaitent liquider l'héritage encombrant de ce qu'ils considèrent de manière quelque peu sommaire comme le modernisme -- et du même coup se débarrasser de la personnalité trop envahissante de Boulez -- mais aussi mettre à mal tout effort collectif de prise en charge de certaines dimensions de la création contemporaine. Plusieurs compositeurs britanniques m'ont par exemple confié que, selon leur expérience, cet ouvrage permet à tous ceux qui ne souhaitent pas voir se développer dans leur pays d'initiative institutionnelle dans le domaine de la recherche musicale (ou de la culture en général), de se « dédouaner ». N'est-il pas paradoxal que le gauchisme de Georgina Born rejoigne et serve ici les thèses les plus débridées du néolibéralisme appliqué à la culture, et fournisse une argumentation toute trouvée à ceux qui souhaitent ainsi se débarrasser de formes « assistées » de la culture? d'un art considéré au mieux comme inutile, au pire comme dégénéré?

Le droit et même le devoir « d'inventaire » sur l'IRCAM, voire sur Boulez, me paraît tout à fait légitime et justifié et, pour tout dire, de saine pratique, ne serait-ce que dans une perspective historique, mais à condition qu'il s'exerce sans préjugés, sans langue de bois, sans opportunisme. Sans qu'il serve d'un côté de prétexte à freiner des initiatives culturelles audacieuses, et de l'autre, de tremplin à une carrière académique!

Comment ne pas souscrire, encore aujourd'hui, aux propos de Boulez quand il avançait, à la naissance de l'IRCAM, que l'intuition du créateur n'était plus suffisante face aux nouveaux défis posés à la création contemporaine par les développements des sciences et des technologies, et qu'il en appelait à l'émergence, dans la pratique sur le terrain, d'un langage commun entre scientifiques et créateurs? Ce discours-là était, et reste toujours, profondément juste et actuel, sans qu'il ait à aucun moment sacrifié à quelque forme de positivisme. L'universalisme critiqué, assimilé à une forme de totalitarisme, n'est-il pas conditionné par (et condition de) toute entreprise collective? Renoncer à formuler des questions de manière commune, afin de trouver des solutions personnalisées, c'est renoncer à toute entreprise collective conséquente.

Comment croire en revanche que quoi que ce soit d'important, dans le champ de l'art, puisse être réglé par l'improvisation collective et/ou l'autorégulation subie des lois du marché, par une forme de darwinisme anarchique économico-culturel? Il ne s'agit pas ici de déprécier des pratiques musicales qui ont leur rôle à jouer dans un ensemble culturel diversifié, mais plutôt de refuser un certain manichéisme habillé de prétextes et prétentions théoriques inconséquentes. À l'heure des comptes, il n'est pas sûr que Cage, quels que soient par ailleurs ses mérites compositionnels et historiques, n'ait pas fait plus de mal à la musique, en légitimant le « n'importe quoi » méthodologique dans le champ de la composition musicale, que Boulez avec son rigorisme qui se révèle d'ailleurs bien relatif. Boulez a toujours su jouer des contradictions de manière créative ; il a accepté la norme parce qu'elle justifiait l'exception et a imposé la rigueur parce qu'elle permettait l'imagination débridée[  6  ].

Toute concentration de moyens, de ressources matérielles et humaines, engendre son lot de passions, de jeux de pouvoir, d'espoirs déçus, a fortiori quand tant d'enjeux se superposent, se confondent. Il n'est pas étonnant que de telles situations extrêmes fassent perdre la tête à certains. Il fallait assurément beaucoup d'autoconviction, d'effort sur soi, de renoncement, pour affronter et surmonter tous les handicaps soulevés par la construction de l'IRCAM, alors même que quasiment tout, en la matière, était à inventer et que tant d'hostilité planait. Il était certes plus facile de rester dans le camp des sceptiques, des ricaneurs, que de s'engager, d'accepter de prendre des risques artistiques et scientifiques, voire humains, que l'on allait devoir assumer non seulement collectivement, mais aussi individuellement.

En dépit de ce que certains ont pu prétendre, l'IRCAM n'a jamais été une officine stalinienne de réglementation de la musique. Que les passions y aient engendré des comportements parfaitement discutables, à tous les niveaux de la hiérarchie, cela est évident. Le reconnaître n'est pas le justifier. Qui n'a pas vécu l'impensable pression sociale et culturelle qui s'exerçait dans les premières années de l'institution peut avoir du mal à prendre la mesure des formidables contraintes qui pesaient sur ses acteurs, du plus exposé au plus humble. Que certains aient « disjoncté », se soient « trompés de film », ne fait pas de doute. Tout cela paraît bien dérisoire rétrospectivement, quelles qu'aient été les blessures psychologiques provoquées ou ressenties par les uns et les autres, les petites mesquineries, les bassesses et la médiocrité des calculs humains, trop humains, les plans de carrière, les renoncements, les arrangements, les faiblesses, les compromis. Toujours la même comédie humaine, jouée de tout temps, en tous lieux. Dans le domaine de l'art, ce ne sont pas les petites histoires, pas forcément aussi édifiantes qu'on le voudrait, qui font la grande histoire. Faute d'avoir appliqué ce principe, Georgina Born se noie dans des détails qu'elle interprète souvent de façon aléatoire et, par conséquent, fallacieuse. Ainsi, beaucoup de sujets de polémiques et de discussions minutieusement retranscrites, tant d'ordre technologique qu'esthétique, paraissent aujourd'hui bien désuètes voire ridicules.

Il est particulièrement regrettable que Georgina Born, par une critique teintée de lutte des classes, n'ait rendu compte des choses que de façon incomplète, et non dans toute leur complexité. De ce point de vue, la personnalité controversée de Boulez a rendu possible l'IRCAM et, dans le même temps, l'a grevé d'un lourd passif en termes d'image. On a longtemps cherché à combattre Boulez en combattant « son » institution, méconnaissant la véritable identité de l'un comme de l'autre, et jetant ainsi le bébé avec l'eau du bain. On aurait été sur ce point en droit d'attendre de l'ouvrage de Georgina Born une réflexion beaucoup plus ambitieuse et surtout conséquente : comment concevoir et faire vivre des institutions sans les lier à la contingence politique, à l'aspect charismatique d'un leader culturel?

Ce fut la grandeur de Boulez de comprendre les dangers potentiels et réels de cette situation et d'avoir su prendre de la distance, se retirer à temps, permettant à l'IRCAM de se développer loin des fausses polémiques, face à ses réels défis. (Ce qui donna accessoirement au compositeur lui aussi libéré l'occasion de faire enfin ce pourquoi aucune légitimité ne peut lui être décemment contesté : utiliser l'institution, parmi d'autres compositeurs, pour réaliser son oeuvre musicale.) Ce n'est en effet qu'après son départ, avec l'équipe placée sous la direction de Laurent Bayle, que l'IRCAM a pu vraiment décoller, enfin libéré des procès d'intentions incessant. Avec la fin de cette époque, l'IRCAM a certes perdu l'esprit enthousiaste des pionniers, mais a gagné en efficacité et en professionnalisme, en marge de manoeuvre, en ouverture, en identité. En un mot : en maturité.

Tout n'est bien sûr pas réglé pour autant, car rien n'est jamais gagné. Comme je l'ai déjà souligné, l'institution doit se remettre en question de manière permanente. Pierre Boulez l'avait lui-même thématisé dans un texte « programmatique[  7  ]" que Georgina Born aurait certainement dû analyser plus finement. Seule face à ses défis, sans l'ombre protectrice mais encombrante de son créateur, l'institution fait aujourd'hui face, encore et toujours, à une nécessité d'évolution : passer du professionnalisme à l'imagination renouvelée, à une nouvelle étape qui reste encore à définir. Voilà l'IRCAM réconcilié avec son image et profondément ancré dans le paysage culturel de notre époque, non seulement français mais international. Tant pis pour tous ceux qui auraient souhaité le contraire.

Aucun discours réducteur, gauchiste ou protolibéral, prêt à livrer la culture aux pseudo-lois du marché, substitut de réelles pensées ou de propositions nouvelles, n'abolira pour moi l'intensité de certains moments exceptionnels, dans le rapprochement et l'interaction des chercheurs et des compositeurs. Car c'est là que résident, à mon avis, l'importance et la pertinence du projet fondateur de l'IRCAM. Je respecte le travail et l'énergie dont l'auteur a dû faire preuve pour arriver au bout de l'entreprise que constitue un tel livre, pour brasser la quantité monstrueuse d'informations, la trier, la mettre en forme, lui donner un sens. Je regrette seulement que le grand livre sur l'IRCAM, historique, critique, prospectif, spéculatif, mais sans agenda a priori et sans point de vue limité, reste encore à écrire.

Bibliographie

BOULEZ, P. (1975). « Donc on remet en question/Perspectives -- Prospections », dans Musique en projet, Brigitte Marger éd., Cahiers Renaud-Barrault, Paris, Gallimard/IRCAM.

Notes

 1.   Soyons clairs : mon itinéraire personnel, dont dix-sept années passées à l'IRCAM, ne me met pas dans une situation que l'on pourrait qualifier d'idéale pour parler avec objectivité du livre de Georgina Born. Je suis en effet un acteur de ce livre, quoique anonyme (puisque les noms ne sont pas cités). Comparativement beaucoup d'autres, j'y ai même un assez beau rôle, celui de jeune compositeur remarqué par Boulez, mis en avant et utilisé par ce dernier, avant d'être laminé, comme beaucoup d'autres, par « Le Système ». Je pourrais donc m'abriter derrière ce sort que l'on me fait (pour autant qu'on affectionne de jouer les perdants, magnifiques ou non) et laisser hypocritement à d'autres le soin de faire la part des choses. Mais telle n'est pas mon intention. Parce que je n'ai pas vécu la même histoire que celle qui est relatée dans ce livre, et que l'histoire n'est pas finie, j'entends bien établir ici ma part de vérité, et ne pas laisser ce seul point de vue occulter la complexité de la réalité de ce que fut et de ce qu'est devenu l'IRCAM. De plus, il convient de préciser que j'ai entretenu à travers les années et maintenu une relation d'amitié avec l'auteure et que cette relation a su s'accommoder de nos différences de points de vue ainsi que de nos différends idéologiques. Les remerciements qu'elle m'adresse dans l'avant-propos de son livre, ne conditionnent en rien ma liberté de jugement, pas plus que ma longue association à l'IRCAM ne m'a jamais empêché de dire ce que je pensais de son fonctionnement, en particulier de ce qui devait y être amélioré.

 2.   « J'étais portée par l'idée de faire l'étude d'une institution de musique contemporaine progressive et d'un profil tellement élevé, et d'essayer de vérifier si mes premières intuitions à propos des institutions de musique sérieuse étaient justes, et si oui, pourquoi. » p. 7 (Traduction libre de l'auteur.)

 3.   Certainement mis de l'avant en raison de la connotation polémique qui s'y rattache, sans parler de "l'effet vendeur" -- une contradiction de plus !

 4.   Cette situation nous rappelle les stages faits au studio de Pierre Schaeffer par un Messiaen ou un Milhaud [N.d.É.].

 5.   Propos de Paul Rabinow (C-4). « Descendant des sphères abstraites de la métapolémique, cette ethnographie montre ce qu'une étude approfondie d'une institution culturelle remarquable peut nous apprendre. Ici, les batailles concernant le sérialisme en musique contre le postsérialisme, l'influence de la culture et de la technique américaines sur la culture française, de la haute culture et de la basse culture, en un mot, de la modernité contre la postmodernité, sont décrites en détail comme des affrontements dans les faits. » (Traduction libre de l'auteur.)

 6.   En termes d'institutionnalisation problématique, que penser des universités américaines où l'on forme massivement des compositeurs de musique électronique, compétents techniquement peut-être, mais trop souvent autosatisfaits, médiocres musiciens, aux horizons culturels étriqués, vivant en circuit fermé, coupés du monde réel dans leur enceinte fortifiée?

 7.   Boulez, P. Donc on remet en question , 1975