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          Frédéric GIMELLO-MESPLOMB, Maître de conférences

 
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PRIX DU LIVRE, MODE D'EMPLOI


La loi sur le prix unique du livre, votée par un Parlement unanime, a été promulguée le 10 août 1981. Après presque quinze années d'existence, cette loi est reconnue par la majorité des professionnels (auteurs, éditeurs, libraires, bibliothécaires) comme une bonne loi. Si la loi est acceptée dans ses principes fondamentaux, les libraires comme les éditeurs se heurtent trop souvent à des difficultés d'application : la présente brochure leur est destinée en priorité. Elle a pour objectif de répondre à leurs difficultés à travers des exemples concrets et en s'appuyant sur les problèmes les plus fréquents qu'ils peuvent rencontrer.

 

Rappel historique

 

La situation avant 1981

 

Le "prix conseillé" a été, jusqu'en 1979, le système en vigueur en France. Le prix pouvait être marqué sur l'ouvrage (marquage facultatif) ; les libraires appliquaient en général ce prix mais étaient libres de vendre le livre avec des remises, voire avec des majorations de prix.

 

En février 1979, un arrêté (dit "arrêté Monory") a instauré le régime du "prix net". L'éditeur ne pouvait plus conseiller un quelconque prix, le libraire étant alors totalement libre de fixer son prix de vente au public sans qu'il puisse indiquer un quelconque prix de référence.

 

La loi du 10 août 1981

 

Elle a instauré le système du prix unique du livre : chaque livre a un prix fixé par l'éditeur ou par l'importateur et ce prix s'impose à tous les détaillants.

 

Après avoir été régulièrement contestée et malgré des critiques qui réapparaissent périodiquement, la loi de 1981 fait aujourd'hui l'objet d'un consensus de la part des professionnels. Lors de son entrée en vigueur, en 1982, la loi sur le prix unique du livre a été l'objet d'une "bataille juridique", de nombreuses grandes surfaces décidant de ne pas l'appliquer. Devant la multiplication des pratiques illégales et la difficulté d'obtenir par des actions civiles leur cessation, le Gouvernement a pris, le 29 décembre 1982, un décret instaurant des sanctions pénales en cas d'infraction à la loi. Le Conseil d'État, saisi d'un recours contre ce décret, a confirmé sa légalité le 8 février 1985.

 

Cette attitude résolument hostile a évolué, en particulier après 1985, lorsque la Cour de justice des communautés européennes a reconnu la conformité de la loi de 1981 avec le traité de Rome (moyennant une modification concernant le prix des livres importés).

 

Il s'avère difficile, sinon impossible, d'établir un bilan statistique de l'application de la loi sur le prix unique du livre, les tribunaux ne conservant pas de statistiques des affaires traitées. Le département de l'économie du livre de la direction du livre et de la lecture dispose toutefois d'un grand nombre de décisions relatives au prix du livre prises par l'ensemble des juridictions (civiles, pénales, commerciales, administratives et internationales).

 


PREMIÈRE PARTIE

 

Qu'est-ce que le prix unique du livre ?

 

Les éditeurs et les importateurs doivent fixer un prix pour chaque ouvrage édité ou importé.

 

Le prix unique signifie que le même livre sera vendu au même prix par tous les détaillants, quelle que soit la période de l'année concernée... à concurrence cependant de la remise légale de 5 % que tous les détaillants peuvent pratiquer.

 

Que l'on soit à Paris, dans une grande ville ou dans une zone rurale, le même livre sera donc vendu au même prix dans les FNAC, dans un hypermarché, dans une maison de la presse ou dans une librairie traditionnelle.

 

Qu'est-ce qu'un livre ?

 

La seule définition légale du livre existant à ce jour est la définition fiscale, donnée par la Direction générale des impôts dans son instruction du 30 décembre 1971 (3C-14-71) :

 

" Un livre est un ensemble imprimé, illustré ou non, publié sous un titre ayant pour objet la reproduction d'une ouvre de l'esprit d'un ou plusieurs auteurs en vue de l'enseignement, de la diffusion de la pensée et de la culture.

Cet ensemble peut être présenté sous la forme d'éléments imprimés, assemblés ou réunis par tout procédé, sous réserve que ces éléments aient le même objet et que leur réunion soit nécessaire à l'unité de l'ouvre. Ils ne peuvent faire l'objet d'une vente séparée que s'ils sont destinés à former un ensemble ou s'ils en constituent la mise à jour.

Cet ensemble conserve la nature de livre lorsque la surface cumulée des espaces consacrés à la publicité et des blancs intégrés au texte en vue de l'utilisation par le lecteur est au plus égale au tiers de la surface totale de l'ensemble, abstraction faite de la reliure ou de tout autre procédé équivalent.

 

Ouvrages répondant à la définition du livre

 

- ouvrages traitant de lettres, de sciences ou d'art ;

- dictionnaires et encyclopédies ;

- livres d'enseignement ;

- almanachs renfermant principalement des articles littéraires, scientifiques ou artistiques, et plus généralement lorsque les éléments d'intérêt général ou éducatif sont prédominants ;

- livres d'images, avec ou sans texte ;

- guides culturels et touristiques ;

- répertoires juridiques, bibliographiques ou culturels ;

- catalogues d'exposition artistiques ne concernant pas de simples répertoires d'ouvres, c'est-à-dire dans la mesure où une partie rédactionnelle suffisante permet de conférer à l'ensemble le caractère d'une ouvre intellectuelle ;

- formulaires scientifiques, juridiques ou culturels ;

- méthodes de musique, livrets ou partitions d'ouvres musicales pour piano ou chant, ouvrages d'enseignement musical et solfèges.


 

Ouvrages ne répondant pas à la définition du livre

 

- almanachs autres que ceux visés ci-dessus ;

- annuaires ;

- guides contenant des listes d'hôtels ou de restaurants, guides de villes et guides à caractère essentiellement publicitaire ;

- catalogues ;

- catalogues et albums philatéliques ;

- indicateurs de chemins de fer, bateaux, tramways et publications similaires ;

- albums à colorier, alphabets et découpages ;

- albums d'images pour enfants conçus pour être découpés ou en vue de la constitution d'une collection ;

- répertoires qui ne comportent que de simples énumérations ; répertoires alphabétiques de personnalités ;

- brochures destinées à commenter le fonctionnement d'un appareil avec lequel elles sont livrées ;

- emboîtages destinés à la présentation des livres lorsqu'ils sont vendus séparément ;

- simples partitions qui diffusent le texte et la musique d'une chanson ; cahiers de musique pour devoirs et papier à musique ".

 

Les supports multimédia comportant un "livre"

 

Il arrive que des livres incorporent des disques, bandes magnétiques, cassettes, films, diapositives. En ce cas, le principe est que chaque support se voit appliquer le taux de TVA qui lui est propre (5,5 % pour les livres, 20,6 % pour les disques et cassettes...).

 

Le livre est-il un "produit" comme les autres ?

 

Par sa diversité (370 000 titres disponibles) et parce qu'il est un véhicule privilégié de la culture, le livre ne peut être considéré seulement comme un "produit". Ce patrimoine écrit doit être partout à la disposition du public ; c'est pourquoi il est indispensable qu'un réseau dense et diversifié de librairies soit maintenu et développé. La loi sur le prix unique du livre n'a pas d'autre but que d'y concourir.

 

La loi sur le prix du livre ne fixe pas le niveau du prix des livres

 

En vertu de l'article 1 er , alinéa 1 er de la loi du 10 août 1981, c'est l'éditeur, ou l'importateur, qui fixe librement le prix de vente au public de chaque titre qu'il édite, ou importe. Il fixe également les éventuels changements de tarif et est tenu d'en informer les détaillants et le public (voir en annexe le décret n° 81-1068 du 3 décembre 1981 et la circulaire du 30 décembre 1981).

 

Dans la "chaîne du livre", on relève peu de grandes marges bénéficiaires ; la faiblesse relative des marges de chacun est la contrepartie d'un paysage éditorial riche et varié. Le prix d'un livre se décompose approximativement comme suit (sur la base d'un prix de vente public incluant une TVA de 5,5 %) :

 

Acteurs de la "chaîne du livre"

Hypothèse basse

Hypothèse haute

Auteur (écrivain, illustrateur, photographe, traducteur, etc.)

8 %

12 %

Fabrication

15 %

19 %

Éditeur (direction littéraire, service de presse, relations publiques, publicité, PLV, promotion...)

11 %

20 %

Diffuseur (représentants)

6 %

10 %

Distributeur (stockage, manutention, facturation)

11 %

14 %

Libraire

25 %

38 %

 

Pourquoi une loi sur le prix du livre ?

 

En 1981, M. Jack Lang, ministre de la culture, a défini devant l'Assemblée nationale les objectifs de la loi : "Ce régime dérogatoire est fondé sur le refus de considérer le livre comme un produit marchand banalisé et sur la volonté d'infléchir les mécanismes du marché pour assurer la prise en compte de sa nature de bien culturel qui ne saurait être soumis aux seules exigences de rentabilité immédiate.

 

Le prix unique du livre doit permettre :

- l'égalité des citoyens devant le livre, qui sera vendu au même prix sur tout le territoire national ;

- le maintien d'un réseau décentralisé très dense de distribution, notamment dans les zones défavorisées ;

- le soutien au pluralisme dans la création et l'édition en particulier pour les ouvrages difficiles."

 

La pratique du bradage ( discount ) entraîne, à long terme, une raréfaction du nombre de titres disponibles, chacun s'attachant alors à proposer des ouvrages à "rotation rapide", connaissant un vaste public ( best-sellers , guides...), au détriment des ouvres de création originale ou des rééditions de titres jugés "difficiles" qui sont pour la plupart des livres à "rotation lente". Dans un tel contexte, seuls les libraires ayant un chiffre d'affaires important pourraient survivre. On assisterait (et c'est ce qui s'est passé en Belgique depuis l'abolition du prix unique du livre en 1984) alors à une réduction du nombre des détaillants de livres, au profit des grandes surfaces (généralistes ou spécialisées), qui sont souvent moins à même que les librairies de taille plus modeste de fournir un service personnalisé aux clients. Enfin, le prix unique dispense l'acheteur de comparer les prix d'un point de vente à l'autre, il préserve ainsi les achats d'impulsion et permet un accès plus facile à la lecture.


 

Les conséquences d'un abandon du prix unique du livre

 

 

 

Abandon du prix unique

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Diminution des prix et discount dans les magasins en ayant la possibilité financière avec la pratique de prix d'appel sur les livres de bonne vente

 

 

 

 

 

 

 

Concentration de la vente au détail

 

Difficultés pour les libraires ne pouvant en faire autant vu leurs coûts et leur assortiment

 

Segmentation de la distribution

 

 

 

 

 

Soumission progressive des éditeurs au débouché croissant des magasins pratiquant les prix les plus bas

 

Disparition de librairies

 

Expansion des ventes de ces magasins an détriment de la librairie en particulier pour les livres de bonne vente

 

 

 

 

 

Diminution de l'assortiment produit

 

Diminution du montant des ventes en librairies

 

 

 

 

 

 

 

Généralisation de la recherche du seul livre de bonne vente

 

Diminution des ventes escomptées

 

La librairie ne peut se "rattraper" en termes de taux de rotation sur les livres de bonne vente

 

 

 

 

 

Concurrence éditoriale accrue pour la promotion et l'accès aux magasins

 

Augmentation des prix de revient par diminution des tirages

 

Augmentation des coûts pour le libraire

 

 

 

 

 

Élévation des coûts

 

Augmentation des prix de vente

 

Diminution de l'assortiment proposé

 

 

 

 

 

 

Concentration éditoriale

 

Tendance à la hausse des prix contrebalançant les prix bas pratiqués par une partie des magasins

 

 

 

François Rouet, Le livre, mutations d'une industrie culturelle , la Documentation française, Paris, 2000, p. 287.

 

À la concurrence par le prix se substitue une concurrence par la qualité du service

 

Le terrain de la concurrence se déplace et les points de vente doivent utiliser d'autres moyens que les rabais. Ce sont les services, la qualité des prestations rendues (service bibliographique, mise en valeur des nouveautés, vaste assortiment, animations, etc...), qui permettent aux détaillants d'accroître leur part de marché. La "concurrence qualitative" remplace la bataille par les prix.

 

Qu'en est-il chez nos voisins européens ?

 

Le prix du livre en Europe

 

Allemagne Prix fixe du livre depuis 1888, sous forme d'accord contractuel entre les

professionnels

 

Autriche Depuis août 2000, une loi sur le prix du livre a succédé à l'accord

interprofessionnel en vigueur jusqu'à cette date

 

Belgique Aucune réglementation sur le prix du livre n'est en vigueur, mais une loi

instaurant un prix fixe est en cours de discussion

 

Danemark Prix fixe du livre depuis 1837, sous forme d'accord interprofessionnel

 

Espagne Un décret royal a instauré, en 1974, un système de prix fixe du livre

 

Finlande L'accord interprofessionnel sur le prix fixe du livre a été supprimé en 1970

 

France Loi du 10 août 1981, sur le prix fixe du livre, en vigueur depuis le 1er janvier

1982

 

Grèce Une loi sur le prix fixe du livre est en vigueur depuis 1997

 

Irlande L'accord interprofessionnel sur le prix fixe a été supprimé en 1989

 

Italie Les accords professionnels instaurant un prix fixe ont été dénoncés en 1996.

Projet de loi en cours de discussion

 

Luxembourg L'accord interprofessionnel sur le prix fixe s'applique aux livres

luxembourgeois, mais pas aux importations

 

Norvège Application d'un prix fixe sur la base d'un accord interprofessionnel

 

Pays-Bas Accord interprofessionnel sur le prix fixe depuis 1923

 

Portugal Loi sur le prix fixe depuis 1996

 

Royaume-Uni Le " Net Book Agreement " (NBA), accord interprofessionnel organisant le

régime de prix fixe du livre, a été supprimé en 1995

 

Suède L'accord interprofessionnel organisant le prix fixe du livre a été supprimé en

1970.

 

Suisse Prix libre ; interdiction de l'accord en Suisse allemande en 1999

 

 

 

Dans l'Union Européenne, 9 pays sur 15 ont donc actuellement un système de prix fixe pour le livre : 5 en vertu d'une loi (Espagne, France, Autriche, Grèce, Portugal) et 4 en vertu d'accords interprofessionnels (Allemagne, Danemark, Pays-Bas et Luxembourg). Parmi les 6 pays n'ayant pas aujourd'hui de système de prix fixe pour le livre (Belgique, Finlande, Irlande, Royaume-Uni, Italie et Suède), deux envisagent d'en instaurer un sous forme législative (Belgique et Italie). A l'inverse, l'avenir du système danois paraît aujourd'hui incertain.

 

 

Allemagne

 

Le prix fixe du livre existe depuis 1888. Le prix est fixé par l'éditeur (le système est facultatif, l'éditeur n'est pas obligé d'y souscrire); c'est un contrat collectif, régi par le droit privé, qui lie chaque libraire à l'ensemble des 1700 éditeurs affiliés. Le non respect de ces prix est considéré comme une rupture du contrat. Le 1 er octobre 1993, les trois pays de la zone linguistique germanique, à savoir l'Allemagne, l'Autriche et la Suisse alémanique ont passé un accord fixant les prix du livre, dans leurs devises respectives. En prévision de l'adhésion de l'Autriche à l'Union européenne, devenue effective le 1 er janvier 1995, les associations concernées ont demandé une dérogation basée sur la verticalité des accords entre éditeurs et libraires avec comme condition la similarité des prix de vente (hors TVA) entre l'Autriche et l'Allemagne. Dans sa réponse du 29 juillet 1994, la Commission a fait savoir que les accords remplissaient les conditions d'exemption énoncées dans l'article 81 du Traité des Communautés européennes. Cette exemption était néanmoins délivrée à titre provisoire, principalement dans l'attente d'une harmonisation des prix entre l'Allemagne et l'Autriche avant le 30 juin 1996. A la suite d'une plainte déposée par Libro, la principale chaîne de librairies en Autriche, un éditeur scolaire autrichien et la chambre fédérale des employés et travailleurs d'Autriche, la Commission a réexaminé sa position. Elle a auditionné les parties allemandes et autrichiennes les 16 et 17 septembre 1998 en présence des parties plaignantes et des représentants des Etats membres (services en charge de la concurrence). Finalement, la Direction Générale de la concurrence a estimé que les accords transfrontaliers en vigueur entre éditeurs et libraires allemands et autrichiens n'étaient pas conformes aux règles de la concurrence européenne. La Commission européenne a reconnu la validité des seuls accords nationaux.

Prenant acte de cette décision, les autorités et professionnels allemands ont cherché à se prémunir contre des risques de contournement du régime national allemand par le biais de pratiques de réimportation. A cet effet, des clauses spécifiques sont venues compléter le droit de la concurrence allemand. Comme d'autres pays européens, l'Allemagne est en effet confrontée aujourd'hui à des contournements de sa réglementation par des sites internet vendant des livres allemands à partir de l'Autriche.

 

 

Autriche

 

Le système du prix du livre était basé jusqu'à l'année 2000 sur des accords entre éditeurs et libraires dans toute la zone germanophone, dénommée "Sammelrevers". Lorsque l'Autriche est entrée dans l'Union Européenne, l'arrangement devait être conforme aux règles européennes de concurrence. En 1998, la Commission Européenne a ouvert une procédure contre les parties à l'accord "Sammelrevers" pour violation de ces règles. Finalement, libraires et éditeurs ont mis fin à leur accord, le 30 juin 2000.

La Commission a par la même occasion rappelé qu'un système contractuel ou législatif de prix établi nationalement ne tombait pas sous le coup des règles de concurrence européenne.

En juin 2000, le Parlement autrichien a adopté une loi sur le prix unique. Les éditeurs et importateurs ont demandé à cette occasion que le système de prix fixe couvre également les ouvrages de langue allemande. Une clause spéciale prévoit que le prix des livres importés ne doit pas être inférieur au prix fixé par l'éditeur dans son propre marché. Cette clause est particulièrement importante pour l'efficacité du système car la grande majorité des ouvrages proposés à la vente en Autriche sont importés d'Allemagne. Les livres autrichiens réimportés restent soumis au prix unique si la réimportation vise explicitement à contourner la loi autrichienne. La loi autrichienne mentionne que les ventes transfrontalières de livres commandés sur l'internet ne sont pas soumises au prix fixe.

Dès l'entrée en vigueur de la loi autrichienne, la chaîne Libro a lancé une campagne publicitaire en offrant des bestsellers avec des rabais de 20% sur le prix éditeur. Cette action a provoqué d'importantes réactions en Allemagne et en Autriche. L'issue de cette affaire pourra avoir des répercussions importantes sur l'avenir du prix fixe en Autriche et en Allemagne.

 

 

Belgique

 

Le marché du livre en Belgique, pays composé de 4,5 millions de francophones et de 5,5 millions de néerlandophones, se caractérise par une configuration très singulière. En Flandre, 60% des ouvrages sont importés des Pays-Bas (le marché flamand représente 25% du CA de l'édition néerlandaise) et la majorité des éditeurs flamands sont des filiales d'éditeurs hollandais. En Belgique francophone, 70% de la production en moyenne est importée de France, le marché belge représentant 5 à 6 % du chiffre d'affaire de l'édition française.

En Flandre, depuis 1929, date de création de la VBVB (association interprofessionnelle pour la promotion du livre flamand), le commerce du livre était régi par un système de prix imposé pour la production flamande et les ouvrages importés des Pays-Bas. En 1949, la VBVB et la VBBB (Association pour la promotion des intérêts de la librairie) ont étendu le système du prix imposé à toute la zone linguistique. En 1984, la Commission européenne a rendu une décision défavorable à la poursuite de ce système. Depuis le prix du livre en Flandre est totalement libre. Dans la perspective de l'euro, on assiste à un rapprochement progressifs des prix entre la Flandre et les Pays-Bas.

La Belgique francophone, quant à elle, n'a jamais eu de système de prix unique. La décennie 1990 a vu s'élaborer plusieurs projets de loi visant a instaurer ce système, mais ceux-ci n'ont pas abouti. Il convient par ailleurs de souligner que le prix de la plupart des ouvrages français est supérieur au prix fixé par les éditeurs français dans la mesure où une tabelle d'environ 10% leur est appliquée.

Actuellement, la Belgique s'achemine vers une loi fédérale sur le prix unique du livre. Le texte s'inspirera de la loi française, en l'adaptant à la spécificité du marché belge.

 

 

Danemark

 

Depuis 1830, le Danemark connaît un système de prix fixe qui est basé sur un accord conclu entre l'Association des éditeurs danois et l'Association des libraires danois. Celui ci s'est cependant sensiblement assoupli, puisqu'en 1988, la période d'application du prix fixé par l'éditeur a été ramené à l'année de parution plus un an, sauf exception réglementée par le Conseil du commerce du livre. En outre, les libraires, qui avaient auparavant l'exclusivité de la vente de livres, ne l'ont aujourd'hui que pour la vente des ouvrages dont le prix est supérieur à 155dkr (environ 20 euros), et devraient prochainement la perdre.

En 1999, l'autorité danoise de la concurrence, désireuse d'ouvrir le marché du livre à plus de concurrence, commandita une étude sur l'état du marché danois et organisa en novembre un atelier de travail réunissant les deux associations. En décembre 1999, ces dernières signifièrent leur accord pour l'abandon du système d'exclusivité ; elles se prononçèrent cependant, de même que les deux associations d'auteurs, pour le maintien du système de prix fixe, eu égard notamment à la situation britannique où le prix moyen des livres a augmenté depuis la suppression du NBA. En février 2000, l'association des éditeurs a proposé un système dans lequel la fixation du prix serait une option pour les éditeurs, et non plus une obligation. L'association des libraires danois s'est insurgée contre cette proposition, estimant que cela aboutirait à un effondrement du système de prix fixe. En avril 2000, l'autorité danoise de la concurrence rendait un avis limitant la fixation du prix aux seules nouveautés et abolissant l'exclusivité accordée aux librairies pour la vente des ouvrages de plus de 155 DKr. L'association des libraires a fait appel de cette décision, qui devait s'appliquer à partir du 1 e  janvier 2001.

Un projet de loi sur le sujet pourrait être déposé si les professionnels et l'autorité chargée de la concurrence n'aboutissaient pas à un accord.

 

 

Espagne

 

La vente des livres en Espagne est régie par le système de prix fixe instauré par l'article 33 de la loi sur le livre du 12 mars 1975 et développé dans le décret royal 484 du 30 mars 1990 sur le prix des livres. Celui-ci précise que tout éditeur ou importateur de livres est obligé d'établir un prix fixe de vente au public ou au consommateur final, pour des livres édités ou importés, indépendamment du lieu où se réalise la vente ou de la manière dont celle-ci s'effectue. De ce système général sont exclus les livres de bibliophilie, art ou artisanat, anciens ou les éditions épuisées, les livres d'occasion ou hors catalogue. Les manuels scolaires, sont théoriquement régis par le système du prix fixe, mais le décret-loi royal du 24 juillet 2000 autorise les détaillants à pratiquer en toute liberté des rabais sur le prix fixé par les éditeurs. Les professionnels espagnols se sont fortement émus de cette dernière disposition.

 

 

Finlande

 

Il n'y a plus de système de prix fixe en Finlande depuis 1971. Les prix sont donc totalement libres, car la loi de la concurrence interdit les prix fixes sur tous les biens et services. De 750 à la fin des années 60, le nombre de librairies est tombé à environ 450 au milieu des années 90 ce qui reste un chiffre élevé si on le rapporte à la population finlandaise; les librairies représentent environ 50% du marché. Lors de l'entrée de la Finlande dans l'Union Européenne, les éditeurs et libraires finlandais n'ont pas souhaité réintroduire le prix unique du livre sur leur territoire.

 

 

France

 

La loi relative au prix du livre, votée à l'unanimité par le Parlement, a été promulguée le 10 août 1981. Elle instaure un prix fixe pour les livres qui doivent être vendus par l'ensemble des détaillants en respectant le prix fixé par l'éditeur. Les détaillants ont la faculté d'accorder un rabais maximal de 5% sur le prix fixé par l'éditeur.

Cette loi s'appuie sur une définition fiscale du livre (instruction du 30 décembre 1971-3c-14-71) servant de base pour distinguer les produits bénéficiant du taux de TVA réduit (5.5 %). Une réflexion est actuellement en cours pour adapter cette définition au nouveau contexte créé par le développement des technologies numériques.

Pour les livres édités en France, l'éditeur doit déterminer le prix de chacun des ouvrages qu'il publie à destination du marché français. Pour les livres importés, la loi n° 92-546 du 20 juin 1992 relative au dépôt légal, énonce que "sont réputés importateurs (...) ceux qui introduisent sur le territoire national des documents édités ou produits hors de ce territoire" . Pour les livres édités dans un pays membre de l'Union européenne , " le prix de vente au public en France ne peut être inférieur au prix de vente fixé ou conseillé par l'éditeur pour cette vente ou au prix de vente au détail fixé ou conseillé dans le pays d'édition ou dans le pays de mise en libre pratique, exprimé en francs français, ou au prix résultant de la répercussion sur ces prix d'un avantage obtenu par l'importateur dans le pays d'édition" (article 4, alinéa 2, du décret du 3 décembre 1981 modifié par le décret du 10 janvier 1990). Enfin, pour les livres édités hors d e l'Union européenne , c'est le premier importateur qui fixe le prix de vente au public; si, ultérieurement, il se présente un autre importateur pour le même ouvrage, celui-ci est tenu de respecter le prix fixé par le premier importateur. La loi du 10 août 1981 fait par ailleurs obligation aux éditeurs d'imprimer le prix sur la couverture du livre.

L'article 1 er alinéa 4 prévoit que les détaillants doivent pratiquer un prix effectif de vente au public compris entre 95 et 100% du prix fixé par l'éditeur ou l'importateur. Ces dispositions ne sont pas applicables aux associations facilitant l'acquisition des livres scolaires pour leurs membres. Ce sont principalement les associations de parents d'élèves et des associations d'élèves ou d'étudiants. La limitation à 5% du rabais sur le prix fixé par l'éditeur n'est pas applicable non plus aux ventes de livres, pour leurs besoins propres, à certaines collectivités dont les établissements d'enseignement, les comités d'entreprise et les bibliothèques. L'arrivée massive de grossistes sur les marchés des collectivités a pénalisé les libraires dont la plupart n'ont pas la capacité de proposer des rabais équivalents à celles des grossistes. Une réflexion est actuellement en cours sur un éventuel plafonnement des rabais aux collectivités. Celui-ci constitue l'une des revendications prioritaires des professionnels français.

Les clubs de livres recouvrent les systèmes d'édition et/ou de distribution qui réservent leurs ventes à des abonnés ou à des adhérents, sous la forme de vente par correspondance, courtage, abonnement ou dans des lieux spécialisés. Un délai de neuf mois, à compter de la date du dépôt légal de la première édition, s'applique aux clubs de livres souhaitant publier un ouvrage à un prix inférieur à celui de la première édition. Lorsqu'une personne se contente de vendre des ouvrages, sans les éditer elle même, et assure uniquement la fonction de diffusion d'un ouvrage, par voie d'abonnement, courtage ou correspondance, elle doit être assimilée à un détaillant et appliquer la règle générale de respect du prix de vente au public fixé par l'éditeur ou l'importateur.

Les détaillants peuvent pratiquer des prix inférieurs à 95% du prix de vente au public fixé par l'éditeur ou l'importateur sur les livres édités ou importés depuis plus de deux ans, et dont le dernier approvisionnement remonte à plus de six mois . Passés ces délais, le détaillant peut donc solder les ouvrages (article 5).

Le législateur a par ailleurs tenu à valoriser, dans cette loi, les services offerts par les libraires. C'est ainsi que l'article 1 er alinéa 3 dispose que "tout détaillant doit offrir le service gratuit de commande à l'unité". Dans le même esprit, l'article 2 dispose que les éditeurs doivent intégrer dans leurs conditions de vente "la qualité des services rendus par les détaillants". Cette remise qualitative doit être supérieure à la remise résultant de l'importance des quantités acquises par les détaillants (remise quantitative).

Après avoir été contestée par certains opérateurs dans les années qui suivirent son entrée en vigueur, la loi sur le prix unique fait aujourd'hui l'objet d'un consensus de la part de la grande majorité des professionnels français. Sa conformité avec le Traité de Rome a été reconnue en 1985 par un arrêt de la Cour de justice des communautés européennes (moyennant des modifications, apportées depuis lors, concernant le régime des livres importés).

Les dispositions de la loi du 10 août 1981 s'appliquent, en France, à la vente de livres par l'Internet. Une procédure a été engagée par le syndicat national de l'édition à l'encontre d'un site proposant, à partir d'un pays étranger, des livres français à des consommateurs établis en France, avec des rabais supérieurs à 5%. L'issue de cette procédure permettra de voir dans quelle mesure la loi française peut s'appliquer à ce type de ventes.

 

 

Grèce

 

Le prix du livre en Grèce est fixé par une loi adoptée à la fin de l'année 1997 sur le modèle de la loi française. Cette loi introduit pour les éditeurs l'obligation d'appliquer un prix fixe pour les livres.

La vente des livres par une tierce partie ou par l'éditeur lui même avec un rabais de plus de 10% est interdite. Toutes les offres supplémentaires faites au public, à moins d'être spécifiquement autorisées par l'éditeur, sont interdites. Il faut souligner que ce régime s'applique uniquement aux livres publiés ou réimprimés dans les deux ans après la date de fixation du prix. A l'issue de cette période, les livres peuvent faire l'objet de rabais totalement libres.

Quelques exceptions au système de prix fixe existent, notamment pour les livres mis à disposition des écrivains, du secteur public, des entités publiques, culturelles, institutions scientifiques, organisations professionnelles dans le secteur du livre, pourvu que cela ne soit pas fait dans le but d'une exploitation commerciale. Le système s'applique aussi aux CD-ROM s'ils sont une simple numérisation d'un ouvrage existant.

Les infractions au système sont à la fois de nature civile et pénale. Depuis l'introduction de la loi, les fédérations d'éditeurs et/ou de libraires ont entamé de multiples procédures afin de faire cesser les infractions. Après les condamnations prononcées par le Tribunal de Première Instance, une grande librairie a remis en question la constitutionnalité de la loi devant le Conseil d'Etat. L'issue de cette procédure sera connue dans le courant du dernier trimestre 2000.

La Commission Européenne a par ailleurs reçu une plainte concernant la conformité de la législation grecque sur le prix unique avec la législation européenne sur la liberté de circulation des marchandises et la directive sur le commerce électronique. La fédération grecque des libraires et des éditeurs a émis une demande au Ministère de la Culture pour maintenir l'application de la loi et adopter de nouvelles propositions afin de renforcer le système du prix unique.

 

 

Irlande

 

La vente des livres en Irlande était régie par le Net Book Agreement (NBA) jusqu'en 1989, date de la décision de la Commission européenne de s'opposer aux aspects transnationaux de l'accord interprofessionnel britannique. Suite à la décision de la Commission européenne, les associations de libraires et d'éditeurs irlandais ont soumis une proposition d'accord de fixation des prix pour les livres irlandais. Sur le fondement d'arguments économiques, les autorités irlandaises ont refusé cette proposition.

 

 

 

 

Italie

 

En Italie des accords interprofessionnels entre éditeurs et libraires étaient en vigueur dans les années 80. Ils ne s'appliquent plus aujourd'hui, les autorités de la concurrence les ayant déclarés illicites. Les détaillants ont donc la faculté de concéder d'importants rabais sur les prix fixés par l'éditeur. Actuellement, les grands groupes de distribution proposent des rabais de 20% sur les nouveautés et jusqu'à 30% lors de certaines opérations de promotion. Quelques librairies, plus particulièrement dans les grands centres urbains, concèdent aussi 20% de réduction à leurs clients. Dans le réseau des magasins de discount, les livres retirés du circuit normal de vente sont offerts avec des rabais allant jusqu'à 50%. Sur internet, on trouve des rabais de 10 à 15% mais, en général, ils ne portent que sur quelques titres et sont limités dans le temps. Les maisons d'édition (particulièrement les plus importantes) organisent des campagnes publicitaires dans les librairies, offrant 20% de réduction, pour certaines séries de livres pendant une période donnée de l'année (janvier-février). Il n'y a en général pas de rabais sur les nouveautés scolaires, bien que récemment quelques grandes sociétés aient vendu des manuels avec des réductions (ou des conditions spéciales de paiement) aux clients qui achètent l'ensemble des manuels nécessaires pour l'année scolaire. De plus, dans le marché du livre scolaire d'occasion, certains grands opérateurs offrent des rabais de 40 à 50% suivant l'état du livre.

L'Association des libraires et l'Association des éditeurs souhaiteraient qu'il y ait une loi fixant un prix unique et limitant le discount à 10%. En 1998, la Commission Nationale du livre, notamment sous la pression des libraires, a préparé une loi qui devait être adoptée par le gouvernement de Romano Prodi, mais les changements politiques qui ont suivi n'en ont pas permis l'adoption. Le 17 juillet 2000, une réunion importante a été organisée par le ministère des Affaires culturelles. La ministre, Madame Giovanna Melandri, s'est officiellement exprimée sur la question de la loi sur le prix unique et a souhaité qu'un projet de loi prévoyant l'instauration du prix unique soit de nouveau proposé. Dans le projet actuellement à l'étude, le montant maximal de rabais autorisé est fixé à 10%. La loi serait assortie de mesures incitatives en faveur des librairies, que la Ministre italienne définit comme la "colonne vertébrale" de la diffusion de la culture par le livre.

 

 

Luxembourg

 

Les livres édités au Luxembourg bénéficient d'une exemption à l'interdiction générale sur les prix imposés. Par le biais d'un accord avec les libraires, les éditeurs fixent le prix des livres. Cependant, les détaillants ont la possibilité de ne pas respecter les prix fixés par les éditeurs, notamment en offrant des rabais importants lors de ventes en quantité. La pratique du "dumping" est toutefois prohibée.

Une grande quantité de livres vendus au Luxembourg est importée : ces importations ne sont pas couvertes par la réglementation. Un accord avec l'Office d'Etat pour le Contrôle des Prix permet aux libraires d'utiliser un taux de change particulier sur les livres pour financer le transport et, le cas échéant, les droits de douane. Ce taux est d'environ 10% au dessus du taux de change normal. Mais cette pratique n'est pas toujours appliquée et il y a eu récemment des cas de réduction de prix qui ont déstabilisé le marché.

Il existe actuellement une crainte quant à l'ouverture de magasins de discount dans le pays : c'est pourquoi les associations de libraires et d'éditeurs travaillent sur une proposition de loi similaire à celle qui se prépare en Belgique, mais tenant compte de la situation particulière du Grand Duché du Luxembourg.

 

Norvège

 

La Norvège applique un prix fixe du livre établi sur la base d'un accord entre éditeurs et libraires. Cet accord bénéficie d'une autorisation délivrée par l'autorité norvégienne chargée de la concurrence et par le ministère du travail. Cette autorisation est valable jusqu'à l'année 2004.

 

Le ministère de la culture norvégien a demandé au Conseil norvégien pour les affaires culturelles d'engager une réflexion sur l'application éventuelle d'une loi sur le prix du livre en Norvège. Enfin, il est à noter qu'il n'existe pas de TVA sur le livre dans ce pays.

 

Pays-Bas

 

Depuis 1923, le commerce du livre aux Pays-Bas est organisé selon un système de prix fixe sous la forme d'un accord collectif entre éditeurs, libraires, importateurs, grossistes et clubs de livres. En 1967, cet accord s'est vu accorder une exemption à la loi de 1956 sur la concurrence économique qui interdit les liaisons verticales collectives de prix. Cette exemption a été confirmée en 1985 puis en mars 1997. Elle est valable jusqu'en 2005, date à laquelle une évaluation sera réalisée par les ministères de la culture et des affaires économiques.

Tous les professionnels du marché du livre sont reconnus par le KVB (Chambre royale du livre) et adhèrent au système en signant le règlement "Handelsverkeer". Les livres éducatifs sont inclus dans le système. Pour les écoles, il peut y avoir une réduction de 5%. Quand plus de trente livres du même titre sont vendus en même temps il peut y avoir une réduction de 10% peut être accordée.

Jusqu'en 1984, l'accord était complété par une convention avec la VBVB, étendant l'obligation de respect du prix fixe à l'ensemble de la zone linguistique commune à la Flandre et aux Pays-Bas. En 1984, la Cour de justice des Communautés Européennes a estimé que cet accord transfrontalier était illicite, confirmant ainsi la décision rendue en 1981 par la Commission européenne au terme d'une procédure engagée en 1977 en vertu de l'article 81 TCE. La Cour a confirmé d'une part que cet accord constituait une infraction à l'article 81§1 TCE et d'autre part que l'accord ne pouvait pas bénéficier d'une exemption au titre de l'article 81§3 TCE car les requérantes n'avaient pas démontré que l'accord était une condition à l'amélioration de la production et de la distribution du livre. Alors que les requérantes souhaitaient porter grief de la contrariété existant entre l'action de la Commission et la politique suivie en matière de prix du livre par divers Etats membres, la Cour a considéré que des " pratiques législatives ou judiciaires nationales, à supposer même qu'elles soient communes à tous les Etats membres ne sauraient s'imposer dans l'application des règles de concurrence du traité ". La Cour a estimé que même si le caractère spécifique du livre comme objet de commerce pouvait justifier des conditions particulières de distribution et de prix, les associations nationales d'éditeurs et de libraires ne pouvaient étendre leur réglementation aux échanges intracommunautaires.

En 1998, la Commission européenne a de nouveau engagé une procédure à l'encontre de l'accord en vigueur aux Pays-Bas. Les importations de livres ayant été retirées de l'accord, cette procédure n'a pas été poursuivie.

 

 

 

Portugal

 

Le décret-loi n°176/96 du 21 septembre 1996 a institué un système de prix fixe, présenté par le préambule du texte comme "  un moyen fondamental de corriger les dysfonctionnements avérés du marché du livre, susceptible, à terme, de créer les conditions d'une revitalisation du secteur  ". Inspiré de la loi française du 10 août 1981, dont il reprend certaines formulations, le texte est cependant plus souple dans ses modalités, puisqu'il limite l'application du prix fixe aux 18 mois suivant la publication des ouvrages, qu'il s'agisse de nouveautés, de nouvelles éditions ou de réimpressions, et autorise un rabais maximal de 10% sur le prix de vente public.

Le rabais autorisé peut néanmoins atteindre 20% dans les cas suivants :

- acquisitions des bibliothèques publiques, scolaires et des organismes sociaux ; actions de promotion du livre et des auteurs portugais à l'étranger (article 12) ;

- actions de promotion de la lecture (foires, salons, événements culturels), lors de périodes déterminées et qui ne peuvent excéder 25 jours dans l'année pour chaque initiative (article 14).

Les manuels scolaires et les livres d'exercices (1 e et 2 e degré) sont exclus du champ d'application du prix fixe (article 15). Il faut souligner qu'une commission technique composée de représentants des associations professionnelles du livre, des associations de consommateurs et du ministère de la Culture est chargée du suivi et de l'évaluation de son application (article 17). De plus, l'article 22 prévoit un processus de révision du décret-loi deux ans après son entrée en vigueur. Les discussions en cours pourraient déboucher sur la modification de certaines modalités du texte (délai d'application, niveau de rabais autorisé, régime des livres scolaires), mais pas sur une remise en cause du principe du prix fixe.

 

Royaume-Uni

 

Le Net book agreement (NBA), accord entre professionnels qui, sous ses différentes versions, a régi le commerce du livre au Royaume Uni depuis le 1 e janvier 1900, a été suspendu en septembre 1995 par la Publishers' association, qui était en charge de son application. Cette suspension, motivée par la sortie de l'accord de deux grands groupes d'édition (HarperCollins et Random House) et d'une grande chaîne de librairie (WH Smith), fut l'aboutissement d'une série de phénomènes convergents à partir de la fin des années 1980 : tout d'abord, les attaques dirigées contre l'accord par les chaînes de librairies Pentos et Waterstones mais aussi l'interdiction par la Commission européenne des aspects transfrontaliers de l'accord (qui s'appliquait également en Irlande), la stagnation du marché au début des années 1990 et enfin, la lassitude d'une partie des membres de la publisher's association devant les frais engagés pour la défense de l'accord devant les instances européennes, puis devant l'Office of fair trading, l'organe britannique de la concurrence qui, à la demande du gouvernement, avait ouvert une nouvelle procédure d'examen du dispositif en 1994.

L'abolition du système semble avoir accéléré le développement des grandes enseignes de distribution et fragilisé le réseau des libraires indépendants. La concentration de la grande majorité des ventes entre les mains d'une poignée de grands acteurs provoque une forte pression sur les marges qui se répercute à tous les niveaux de la chaîne du livre. Par ailleurs, selon les études menées par Francis Fishwick, chercheur associé à la Cranfield School of Management, le prix de vente moyen des ouvrages a subi une hausse estimée à environ 16% entre le deuxième trimestre 1995 et le premier trimestre 1999. Dans le même temps, l'indice général des prix de l'ensemble des produits du commerce de détail n'a augmenté que de 9%.

 

 

Suède

 

Le système du prix unique du livre a été aboli en 1970. Il n'y a pas eu à ce jour de mouvement significatif pour revenir à un régime de prix fixe.

Dans le secteur de l'édition, la Suède est concentrée entre cinq grands groupes. La vente de livres est quant à elle dominée par deux entités, une formée par des libraires indépendants et l'autre par un système de coopérative. Ensemble ces deux organisations possèdent 130 librairies et 70% du marché (chiffres 1997).

Un système d'aide à l'édition, proportionnellement plus important que dans les autres pays de l'Union, a été mis en place quelques années après la libération des prix du livre. Le secteur du livre bénéficie également de la capacité d'achat du réseau des bibliothèques publiques, l'une des pierres fondamentales de la vie culturelle suédoise, qui constitue la première source d'approvisionnement des lecteurs. Une nouvelle forme d'aide aux bibliothèques publiques et scolaires a d'ailleurs été créée en 1997 pour l'achat de livres.

 

Suisse

 

La situation du marché du livre et, plus particulièrement, les politiques du prix du livre pratiquées en Suisse, sont déterminées par le fait que la Suisse est essentiellement un marché d'importation de livres réparti en trois zones linguistiques: allemande, française et italienne.

Dans les zones linguistiques française - Suisse romande - et italienne - Tessin, le marché du livre est actuellement dérégulé. En Suisse romande et au Tessin, le prix du livre est fixé par les éditeurs locaux en ce qui concerne la production autochtone et par les diffuseurs/distributeurs en ce qui concerne les importations française et italienne selon des barèmes de conversion de 15% à 30% au-dessus du change bancaire. Depuis 1991, l'établissement du prix du livre se trouve ainsi entre les mains de plusieurs diffuseurs/distributeurs qui appliquent des barèmes différents. Avant cette date, le prix unique du livre était fondé sur un barème uniforme établi par un accord professionnel de la Société des Librairies et des Editeurs de la Suisse romande (obligatoire uniquement pour les membres de la SLESR) admis par la loi sur les cartels et sous le contrôle d'un préposé à la surveillance des prix.

Les importations françaises représentent 70%-80% du marché du livre suisse romand. Les professionnels romands souhaitent aujourd'hui pouvoir introduire et maintenir un prix unique en Suisse.

En Suisse allemande, l'accord professionnel "vertical" - entre éditeurs et libraires - sur le prix unique du livre, connu sous le terme "Sammelrevers", en vigueur dans les zones germanophones (Allemagne, Autriche et Suisse alémanique), a été déclaré illicite le 7.9.1999 par la Commission de la concurrence suisse. L'Association des libraires, éditeurs et imprimeurs suisses alémaniques a saisi la commission de recours dont l'issue n'est pas connue à ce jour. Pour sa part et pour la première fois, le Conseil fédéral à commandé le 3.1.2000 un rapport à l'Office fédéral de la Culture, en collaboration avec le Secrétariat d'état à l'économie, sur le système du prix unique en rapport avec la politique culturelle et le marché de l'emploi, ainsi qu'en rapport avec le marché suisse et international du livre.

L'implantation de la FNAC en Suisse, en commençant par Genève cet automne, suscite une inquiétude certaine dans le monde du livre: on ne sait toujours pas quelle politique du prix du livre sera pratiquée par cette chaîne.

 

 

 

LES TAUX DE TVA EN EUROPE

 

 

Pays

TVA sur le livre %

Taux normal de TVA %

Autriche

10

20

Belgique

6

21

Danemark

25

25

Finlande

8

22

France

5,5

19,6

Allemagne

7

16

Grèce

4

18

Irlande

0

21

Italie

4

20

Luxembourg

3

15

Pays-Bas

6

17,5

Norvège

0

23

Portugal

5

17

Espagne

4

16

Suède

25

25

Suisse

2,3

7,5

Royaume-Uni

0

17,5

Source: IPA and FEP

 

seconde partie