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Frédéric GIMELLO-MESPLOMB, Maître de conférences |
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Les principales étapes de la mise en place des aides
Les premières aides, les aides au cinéma Des aides automatiques en premier lieu La création de mécanismes publics de financement au cinéma comme à la culture s'est généralisée en Europe depuis la fin des années 50. Le Royaume-Uni et l'Italie, qui dès les années 20 mettent en place leurs premières lois protectrices du cinéma national, font figure de pionniers. Les premiers soutiens financiers des Etats prennent la forme d'aides automatiques à la production cinématographique. En Italie, une aide automatique à la production apparaît dès 1938. En France, mais aussi en Norvège, elles sont mises en place respectivement en 1948 [2] et 1949. En France, le Centre national de la cinématographie (CNC) est institué tout de suite après la seconde guerre mondiale par la loi de 1946 [3] avec pour mission de réglementer l'industrie du cinéma français, alors que le premier ministère de la Culture ne sera créé, quant à lui, qu'en 1959 [4] . Le CNC prend en charge le contrôle des recettes-salles dès sa création et la loi du 23 septembre 1948 met en place une aide automatique à la production alimentée par une taxe sur le prix des places et une taxe à la sortie des films [5] . Une aide similaire est mise en place en 1950 au Royaume-Uni; elle ne sera légalisée qu'en 1957 et disparaîtra en 1985 [6]. Toutes les aides automatiques ne sont pas alimentées par réinjection de ressources prélevées sous forme de taxe sur l'industrie cinématographique. En Espagne, il existait jusqu'en 1985 une taxe sur le prix du billet qui alimentait le budget général de l'aide publique. Celle-ci a disparu et si l'aide automatique, réformée en 1995, est attribuée en fonction des recettes brutes d'exploitation des films, elle provient directement du budget de l'ICAA. Des aides sélectives à partir des années 50 Les premières aides sélectives, elles aussi tout d'abord concentrées sur la production cinématographique, voient le jour dans les années 50 , à un moment où la fréquentation des salles de cinéma connaissent une baisse structurelle sans précédent. L'aide sélective anglaise date de 1949, l'avance sur recettes française est instituée en 1959 avec la création du ministère de la Culture En Espagne, l'aide automatique est instituée en 1964 et apparaît de façon effective en 1977 tandis que l'aide sélective n'est créée qu'en 1983. En Allemagne, la première loi fédérale sur le cinéma date de 1967 [7] , l'aide automatique de 1968 [8] , année de la création de la Filmförderungsanstalt (établissement public autonome chargé de gérer l'aide publique fédérale) et ce n'est qu'en 1974 [9] que les premières aides sélectives y verront le jour. En une décennie, le soutien au cinéma s'est développé dans l'ensemble de l'Europe et, à la fin des années 60, la plupart des pays ont créé leurs systèmes d'aides financières; les derniers à mettre en place une intervention publique sont la Suisse (1969) [10] , le Portugal (1971), l'Islande (1979), la Grèce (1980), l'Autriche (1981) [11] et enfin le Luxembourg (1990) [12] . Depuis la fin des années 80, les politiques nationales en faveur du cinéma des pays d'Europe occidentale tendent à évoluer d'une politique protectionniste et restrictive vers une politique de tutelle plus libérale. L'éclosion des aides régionales Le début des années 80 voit apparaître les premiers mécanismes régionaux de soutien public en Europe. Mais leur émergence ne s'inscrit pas dans le même contexte selon les pays dans lesquels ils apparaissent: en Allemagne, en France, en Espagne, au Royaume-Uni et en Suisse principalement. A l'opposé d'une gestion fédéraliste des aides, on trouve un modèle centralisé à l'instar de la France qui tend, à partir de ces années 80, vers une relative décentralisation et vers une affirmation, certes inégale, des financements publics régionaux. Le cas des Etats fédéraux En République Fédérale d'Allemagne, d'après la Constitution (" Grundgesetz "), le pouvoir et la compétence politiques sont largement partagés entre les 16 Länder (Etats fédéraux) qui partagent leur autorité avec le Bund (Fédération) et dans certains domaines avec les communautés locales. Cette division du pouvoir est particulièrement importante dans le domaine des affaires culturelles et audiovisuelles, non seulement parce qu'elle correspond à la mise en ouvre d'un principe constitutionnel, mais aussi parce qu'elle respecte la décentralisation traditionnelle de la vie culturelle, laissant un important pouvoir d'initiative aux Länder. Au niveau régional, il existe ainsi depuis 10 ans des aides à la production émanant des 16 Länder (120 à 150 million de DEM par an). La Bavière dispose de 50 million de DEM, et la seule Filmstiftung de Nordrhein-Westfalia dispose d'un budget supérieur à celui de l'Etat fédéral pour le Filmförderungsanstalt, les aides du Bundesministerium für Wirtschaft et le Kuratorium Jünger Deutscher Film. Chaque Land a mis en place un fonds de soutien au cinéma et à l'audiovisuel doté, dans la plupart des cas, d'une personnalité juridique propre et de moyens substantiels. Le montant cumulé des budgets de l'ensemble des fonds des Länder étudiés représente 64% de la somme totale consacrée aux mécanismes d'aide publique en Allemagne. Les premiers fonds ont été créés suite à la mise en place des Filmbüro (bureaux régionaux du cinéma)en 1980 et ont été gérés par ces associations de professionnels: le Bayerische Film und Fernseh Fonds (actuel FilmFernsehFonds Bayern) à Münich, le Kulturelle Filmfonds Hamburg et le Kulturelle Filmfonds Nordrhein Westphalia, seul parmi les trois à être encore en activité. Avec la création en 1991 de la Filmstiftung Nordrhein-Westfalia (Fondation du cinéma de Rhénanie du Nord-Westphalie), sous forme de société privée avec un budget annuel de 27,150 million d'Ecus, s'ouvrait une nouvelle période pour le soutien des Länder au cinéma et à l'audiovisuel. En Suisse, bien que le cinéma relève de la compétence de l'Etat fédéral, la culture reste en premier lieu du ressort des cantons. Il n'en demeure pas moins que la Confédération continue à s'engager dans la culture, avec un budget de 190 million de francs suisses en 1998. C'est à ce titre que plusieurs cantons distribuent des aides aux ouvres cinématographiques et audiovisuelles, à côté des aides [13] à la photographie et aux artistes. Ces aides, qui restent modiques, ont vu le jour pour les plus anciennes en 1980, au sein de l'Office de la Culture du canton de Berne et pour les plus récentes en 1988, date de la création du Fonds du film zurichois qui est doté du budget le plus important (1,013 million d'Ecus en 1995). La participation des cantons à l'aide publique suisse au secteur cinématographique ne représentait, en 1995, que 16% de son budget. Vu les menaces qui pèsent aujourd'hui sur les aides cantonales suisses, notamment à Genève et à Zürich où les collectivités publiques endettées ont tendance à diminuer les montants consacrés aux aides culturelles, la part des cantons au financement public de la production cinématographique et audiovisuelle, se trouve considérablement réduite. Ceci a en 1998, conduit les professionnels suisses à se mobiliser pour financer une étude des retombées culturelles et socio-économiques des mécanismes d'aide cantonales [14] . Une décentralisation très inégale suivant les pays En Espagne, la décentralisation a été amorcée dès la fin du franquisme et les dix-sept Communidades autonomas ( communautés autonomes) disposent depuis lors d'un pouvoir politique important et, depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle Constitution en 1978, leurs budgets ont connu une croissance importante. Certaines communautés autonomes ont ainsi mis en place des mécanismes de soutien au cinéma et à l'audiovisuel. La Catalogne fut la première en 1982 et reste la communauté dont les aides directes aux professionnels sont les plus importantes avec un budget annuel de 1,428 million d'Ecus. C'est en 1984 que les communautés de Valence et de Galice mettent en place leurs propres fonds de soutien, suivis du Pays basque en 1991. La Communauté de Madrid, quant à elle, a créé en 1994 un service de promotion du cinéma et de l'audiovisuel qui a opté pour une toute autre forme de soutien, accordant des aides indirectes à travers un programme de modernisation industrielle. Le budget réservé à ces actions était le plus important de toutes les communautés avec 2,550 million d'Ecus en 1995 [15] . Malgré des moyens et des ambitions importants, ce fonds a cessé ses activités en 1996. Le montant cumulé des budgets des cinq communautés autonomes prises en considération ici représentait 25% du budget de l'aide publique totale en Espagne pour l'année 1995. Le Royaume-Uni rassemble quant à lui quatre "nations", l'Angleterre, l'Ecosse, le Pays de Galles et l'Irlande du Nord. C'est en Ecosse qu'est né le premier fonds "régional", le Scottish Film Fund, en 1982. C'est aussi le plus important avec un budget annuel de 0,961 million d'Ecus. Ce n'est que dix ans plus tard qu'ont été créés le Wales Film Council/Screen Wales (le Conseil du film gallois - actuellement Sgrin) qui gère le Welsh Production Fund (fonds du film gallois), the London Film and Video Development Agency (l'Agence du film et de la vidéo de Londres) qui gère le London Production Fund [16] , tandis qu'à Glasgow un fonds spécifique (Glasgow Film Fund) était également mis en place en 1993. En 1994, avant la création du Fonds de soutien de la Loterie nationale, les montants distribués par ces structures régionales représentaient 13% de l'aide publique distribuée au Royaume-Uni. Dans le cadre de la loterie nationale, les Conseils des arts régionaux (Arts Council of Scotland, Wales, Northern Ireland), sont également chargés de la distribution d'une partie des moyens en vue de projets à caractères régionaux. En France, c'est la loi de décentralisation de 1982 qui est le point de départ de l'intervention des collectivités locales et principalement des régions, dans le secteur du soutien au cinéma et à l'audiovisuel, jusque là fortement centralisé et de la compétence du seul CNC. Pourtant ces lois de décentralisation étant restées muettes sur la question des compétences de ces collectivités en matière cinématographique, toute intervention des autorités locales en ce domaine doit obligatoirement se faire conjointement avec l'Etat. Ainsi, les départements, les régions, et parfois les municipalités, signent des conventions avec le CNC. Malgré tout, certaines régions ont créé des dispositifs durables de soutien au cinéma et à l'audiovisuel. Toutefois, à part Rhône-Alpes Cinéma , les moyens financiers disponibles restent modestes, les moyens cumulés des structures régionales les plus importantes [17] ne représentant que 2% des moyens totaux de l'aide publique au cinéma et de l'audiovisuel en France. La première structure mise en place a été le CRRAV - Centre régional de ressources audiovisuelles de la région Nord-Pas-de-Calais. Son objectif initial était de créer une activité économique autour de l'audiovisuel, et ce dans une région sinistré par la chômage et le recul de l'activité économique. L'année suivante, c'est l'Aquitaine qui a créé l'ANC, association qui gère le Fonds régional d'aide à l'industrie de programmes et de l'image. Mais c'est surtout à partir de la fin des années 80 que le plus grand nombre de structures se met en place. Le fonds régional le plus important est Rhône-Alpes Cinéma (anciennement nommé Centre Européen du Cinéma Rhône-Alpes), créé dans le cadre d'une convention avec le CNC en 1991, sous forme d'une société privée (c'est en France actuellement le seul fonds à avoir ce statut). Il peut investir jusqu'à 3,1 million d'Ecus par an dans la coproduction cinématographique ; le budget annuel du CRRAV était, quant à lui, de 1,80 million d'Ecus en 94/95. On compte aujourd'hui dix-sept conseils régionaux, six conseils généraux et deux municipalités à soutenir financièrement le cinéma dans des proportions allant de 3,1 million d'Ecus pour la région Rhône-Alpes en 1995 à 15 000 Ecus pour la ville de Clermont-Ferrand [18] . Les difficultés financières qu'a rencontrées Rhône-Alpes Cinéma en 1998, résultant d'un changement de majorité politique au niveau de la région et le non-vote de la subvention régionale sur lequel est indexé la contribution du CNC, est très illustratif du paradoxe "existentiel" auquel l'ensemble des fonds régionaux sont confrontés. En effet, étant en grande partie dépendant financièrement des contributions des collectivités territoriales dont le vote sur le budget annuel est conditionné par la majorité politique en place, la difficulté majeure des fonds régionaux est de pouvoir s'inscrire durablement, ou tout au moins sur le moyen terme dans le paysage des mécanismes d'aide publics. Parmi les initiatives régionales originales, il faut également mentionner le Wiener Filmförderungsfonds (fonds de soutien du Film viennois) créé en 1984, ayant également un objectif à visée économique. A lui seul, il représentait 28% du budget de l'aide publique directe en Autriche en 1995. Des transferts aux communautés linguistiques A côté de ces pays, le cas de la Belgique est particulier. Ce pays est devenu progressivement un Etat fédéral. Le processus a débuté en 1971 avec la première révision de la Constitution, suivie par d'autres révisions en 1980, 1988 et 1993. Le règlement actuel est dérivé d'un accord qui repose sur des considérations aussi bien territoriales que linguistiques. Trois régions (la Région Flamande, la Région Wallone et la Région Bruxelles-Capitale) sont responsables de matières relatives au territoire, par exemple l'économie et l'emploi. Il existe également trois communautés linguistiques (la Communauté flamande, la Communauté française et la Communauté germanophone), responsables notamment de questions culturelles. Suite à la réforme constitutionnelle de 1980 transférant au niveau communautaire un certain nombre de compétences et en particulier en matière culturelle, l'aide publique gérée encore de façon triangulaire (par l'Etat et les deux communautés française et flamande) jusqu'en 1989 est désormais entièrement communautarisée. Les Régions et les Communautés ont pour compétence la coopération internationale et sont autorisées à conclure des accords internationaux et à signer des traités dans les limites de leurs pouvoirs. La Communauté flamande en 1993 et la Communauté française en 1999 [19] ont chacune créé un organisme autonome responsable de la gestion et de la distribution des aides en matière cinématographique et audiovisuelle. L'apparition des aides à l'audiovisuel à partir des années 80 L'évolution du secteur Depuis l'apparition des premières aides sélectives, les interventions des Etats se sont étendues et spécialisées pour s'adapter à l'évolution des marchés cinématographiques et audiovisuels et pour prendre en compte de nouvelles formes de création audiovisuelle et multimédia. Avec une gestion de la politique d'aide concentrée autour d'un seul organisme nationale et une approche systémique, la France est sans doute le cas où l'on peut observer le plus aisément tout l'impact de cette évolution. Le CNC a en effet adapté le système national de soutien, toujours en étroite concertation avec les milieux professionnels, au fur et à mesure de l'évolution du secteur. Actuellement tout domaine de la création cinématographique et audiovisuelle ainsi que les industries techniques ou encore, depuis 1993, l'édition vidéo et multimédia [20] , sont soutenus. Les premières aides aux ouvres audiovisuelles datent de la fin des années 1970. En 1986, avec la création du Compte de soutien aux industries de programmes (COSIP) [21] , se met en place le fonctionnement actuel du soutien aux ouvres audiovisuelles [22] , ouvres qui peuvent bénéficier, quel que soit leur genre (fiction, animation ou documentaire), d'une aide sélective ou automatique. En instituant une nouvelle taxe sur la vente et la location de cassettes vidéo [23] , l'Etat français a également mis en place en 1993 une aide sélective et une aide automatique à l'édition vidéo [24] . Si certains fonds soutiennent exclusivement les ouvres cinématographiques, de nombreux autres s'adressent indifféremment au cinéma et à l'audiovisuel. Le cas du CNC, qui dans l'établissement de son budget opère une distinction explicite entre soutien aux ouvres cinématographiques et soutien à l'audiovisuel, reste relativement exceptionnel en Europe. Le rôle des fonds régionaux de soutien Dans certains pays, les aides au secteur de l'audiovisuel apparaissent avec les mécanismes de soutien créés au niveau régional. Ainsi, en Espagne, l'ICAA continue de n'apporter son soutien qu'à l'industrie cinématographique alors que les aides au secteur audiovisuel sont apparues avec les fonds des communautés autonomes, soit en 1982, avec le fonds de la communauté autonome de Catalogne. C'est également le cas en Allemagne où les aides existant au niveau fédéral (aide du FFA, aide du Bundesministerium des Innern et aides au jeune cinéma allemand du Kuratorium Junger Deutscher Film) s'adressent exclusivement à des ouvres destinées à une exploitation en salle. Les aides au secteur de l'audiovisuel sont apparues dans le cadre des fonds de certains Länder. Dans la plupart des cas, ces fonds traitent indifféremment les ouvres pour le cinéma et les ouvres pour la télévision dans la mesure où elles sont produites par des producteurs indépendants. Cette ouverture à la création audiovisuelle tient également à l'implication importante des chaînes de télévision dans le fonctionnement même de ces organismes. Cependant, ce n'est qu'en 1992 que la première aide exclusivement réservée à la production d'ouvres audiovisuelles et vidéo apparaît, auprès du Bayerische Filmfonds. Le nouveau Filmförderung Hamburg, créé en 1995, distribue également une aide spécifique pour les ouvres télévisuelles. Le financement des aides publiques Dotations publiques nationales et régionales, recettes provenant de taxes spéciales sur l'exploitation d'ouvres cinématographiques, apports des chaînes de télévision et revenus propres constituent les sources de financement principales des structures et fonds gérant les aides publiques en Europe. L'aide publique majoritairement financée par les dotations publiques L'Etat apporte, sur son budget propre, des financements aux mécanismes d'aide publique dans l'ensemble des pays européens. Cependant, dans trois pays d'Europe occidentale, le Danemark, l'Irlande et le Luxembourg, l'Etat reste, comme cela est également le cas dans la majorité des pays d'Europe centrale et orientale, le pourvoyeur principal sinon exclusif de ces mécanismes. Si on s'intéresse d'une façon plus globale à l'ensemble des dotations publiques, (Etat et régions) celles-ci financent la totalité de l'aide publique en Belgique. Citons également la Suisse où 99% de l'aide publique provient également de dotations publiques, le 1% restant provenant d'apports privés. Cette situation s'est toutefois modifié à partir de 1996, avec la mise en place de la Pacte Audiovisuel entre l'Office Fédéral de la Culture et la SSR, au titre duquel ce dernier contribue au financement des aides suisses avec un montant annuel de 9.3 million de CHF jusqu'à 1998 inclut. La reconduction éventuelle du Pacte de l'Audiovisuel pour trois ans sera négocié en 1999. Dans seulement cinq pays d'Europe occidentale, les dotations publiques ne sont pas le principal apport financier de l'aide publique: en Allemagne, où elles financent tout de même 47% du budget des aides publiques contre 30% en Norvège, 29% aux Pays-Bas ou encore 17% en France et 10% au Portugal. Le revenu des taxes prélevées sur l'exploitation cinématographique et la commercialisation des cassettes vidéo Dans sept des pays étudiés, une taxe est prélevée au moment de l'exploitation des ouvres en salle et alimente au niveau national le budget de l'aide publique. Cette taxe est prélevée sur le prix du billet en France [25] , en Grèce [26] , en Islande, en Italie [27 ] , en Norvège [28] , en Suède [29] , et sur le chiffre d'affaires des salles de cinéma en Allemagne [30] . En Suède, en Norvège, en Allemagne et en France , s'ajoute une taxe prélevée sur la commercialisation et la location de cassettes vidéo. Ces revenus sont importants pour chaque pays, même si ce n'est qu'en Norvège qu'ils constituent la principale source de financement de l'aide publique, à hauteur de 70%. Ces taxes représentent 37% de l'aide publique en Suède, 24% en Finlande et en France [31] , 21% en Allemagne, 10% en Grèce et 8% en Italie où les sommes sont exclusivement affectées à l'aide automatique attribuée à la production cinématographique. En France, aux Pays-Bas et au Portugal, les chaînes de télévision sont la principale source de financement de l'aide publique Au Portugal, 90% de l'aide publique, gérée entièrement par l'Institut portugais des arts cinématographiques et audiovisuels, est financé grâce au reversement de la taxe de 4% prélevée sur les spots publicitaires diffusés à la télévision. Aux Pays-Bas, 69% de l'aide publique provient de recettes télévisuelles. D'une part le fonds de promotion de l'audiovisuel culturel (STIFO) reçoit 1/16 des recettes publicitaires des chaînes de télévision publiques, d'autre part sont reversés au COBO-Fund les droits payés par les câblo-opérateurs belges et allemands aux chaînes publiques néerlandaises pour la diffusion de leurs programmes. Par contre, le Dutch Film Fund, est entièrement financé par une dotation du Ministère de l'Education, de la Culture et de la Science. En France, 59% de l'aide publique (soit un montant de 217,43 million d'Ecus en 1995, ce qui représente la plus grosse contribution à une aide publique européenne) provient d'une taxe sur les abonnements et les messages publicitaires des chaînes de télévision privées et sur les ressources des sociétés publiques de télévision, équivalente à 5,5% de ces ressources. Cette taxe est reversée au budget du Centre national de la cinématographie, pour partie à la section "cinéma" et pour partie à la section "audiovisuel" [32] . Les chaînes de télévision contribuent également au financement de l'aide publique, mais de façon plus modeste dans quatre autres pays:
Enfin, il est intéressant de noter que pour l'instant le seul fonds supranational où les chaînes de télévision nationales (publiques et privées) contribuent directement au financement du budget est le Nordisk Film & TV Fond. En effet, SVT, TV4, YLE, DRTV, TV2 Danemark, RUV, Stöd, NRK, TV2 Norvège contribuent à hauteur de 2,35 MECU ou 30% du budget annuel du fonds. Les dernières évolutions des mécanismes publics de soutien La recherche d'un nouvel équilibre entre vocation économique et culturelle du cinéma Depuis leur création, les systèmes d'aide nationaux ont aussi connu des revirements significatifs. Au début des années 90, les lois originelles ont été révisées voire complètement remplacées dans un grand nombre de pays d'Europe occidentale, alors qu'à cette même période les pays d'Europe centrale et orientale se sont dotés de leurs premières lois-cadres du secteur cinématographique basées sur les principes d'économie de marché. Au Royaume-Uni, par exemple, la création du British Screen Finance à forte vocation économique s'accompagne en 1985 de la suppression de l'aide sélective qui datait de 1949 et de l'aide automatique créée en 1950. La faible circulation des productions nationales hors de leurs frontières, les maigres parts de marchés des cinématographies européennes sur leur propre territoire ainsi que les difficultés grandissantes du secteur de la distribution amènent les responsables des différents pays, tout comme les instances européennes à s'accorder sur de nouvelles perspectives avec, en particulier, la volonté d'assumer conjointement la double vocation culturelle et économique du cinéma et de l'audiovisuel. D'une façon générale, la tentative pour les aides publiques consiste à opérer un équilibre entre subvention et investissement, avec toutefois une attention plus forte à l'aspect économique et aux effets structurels sur le tissu d'entreprises de production dans certains pays. On peut citer la modification du système d'aide en Espagne où, en 1995, sous la pression des producteurs, l'ICAA a réformé son système de soutien au long métrage. En particulier, l'aide automatique prend désormais l'allure d'une prime au succès, car il ambitionne de rendre le secteur de la production cinématographique plus indépendant en suscitant une diversification plus large de son financement. L'aide sélective, quant à elle, est réservée aux seuls travaux expérimentaux de réalisateurs accomplis ou à des premiers, deuxièmes ou troisièmes films. En Allemagne, en 1994, est créé le Filmboard Berlin-Brandenburg GmbH, fonds commun à la région de Brandebourg et à la ville de Berlin [33] . Celui-ci se met en place selon une nouvelle stratégie accordant une grande part au devenir commercial des films soutenus et les aides, sous forme d'investissement en coproduction, sont octroyées en fonction du marché potentiel du projet (contrat avec un distributeur, public visé). Une optique de rationalisation et de concertation Pour permettre une meilleure efficience de leurs systèmes de soutien, différents pays ont amorcé des restructurations au début de la décennie. C'est le cas en Finlande avec la réorganisation, en 1995-96, de la Fondation du Film finlandais ou encore en Norvège où l'Institut du Film norvégien et l'Office national du film ont été regroupés en un seul organisme, "Det Norske Filminstitutet", en 1993. Un audit global dispositif d'aide norvégien a d'ailleurs été conduit en 1995-96 [34] . Aux Pays-Bas, l'organisation du soutien à la production a fait l'objet d'une réforme importante qui s'est étalée sur deux années 1991 et 1992 et s'est terminée par la création en mai 1993, d'un fonds unique de financement du film néerlandais (le Stichting Nederlands Fonds voor de Film) remplaçant les deux fonds distincts existant jusque là, le Fonds de production et le Fonds du film, créés respectivement en 1956 et 1983, le premier plus spécifiquement à vocation commerciale et le second à vocation artistique. Au Portugal, l'Institut portugais des arts cinématographiques et audiovisuels (IPACA) a été créé le 1er février 1994 par un décret-loi qui prenait acte du fait qu'aujourd'hui, le cinéma, la télévision et la vidéo sont des réalités qui ne peuvent être envisagées de manière isolée mais au contraire en interdépendance. L'IPACA remplaçait l'Institut portugais du cinéma (IPC), institué en 1971, lors de la création de l'aide systématique à la production cinématographique. Une aide aux productions audiovisuelles a enfin vu le jour en 1997. Une commission d'étude ministérielle a effectué une évaluation stratégique globale de l'état économique et juridique de l'industrie portugaise du cinéma en 1997 [35] . Depuis 1994 et en 1997 surtout, l'administration espagnole a modifié sa politique cinématographique, pour passer d'une politique protectionniste à une politique de tutelle mais plus libérale. En effet, ces dix dernières années, l'industrie cinématographique espagnole (à l'instar de beaucoup d'autres cinématographies nationales en Europe), a connu une profonde mutation qui l'a placé dans une situation difficile et complexe. De multiples facteurs ont déclenché des changements qui étaient nécessaires, non seulement dans la mentalité de l'entrepreneur cinématographique, mais aussi dans l'activité du législateur : le recul de la production jusqu'en 1995, les incidences des diverses dispositions légales, le processus d'intégration en Europe, le secteur jusqu'ici peu réglementé de la télévision, le déclin de l'exploitation en salles, les progrès technologiques, l'apparition de nouveaux moyens d'amortir le produit cinématographique, la hausse constante des coûts de production. Dans ce contexte, deux objectifs étaient privilégiés en ce qui concerne le dispositif d'incitation économique: d'une part permettre au secteur de devenir autosuffisant, d'autre part de ne pas mener une politique interventionniste dans le secteur. En 1994, l'Italie mettait en place un nouveau décret-loi "Interventions urgentes en faveur du cinéma" modifiant la loi de 1985 [36] . Celle-ci est actuellement la loi de référence en matière d'aide publique au secteur privé [37] . Ce nouveau décret mettait notamment en place le fonds de garantie bancaire géré par la Banco Nazionale del Lavoro qui apparaît désormais comme un des outils majeurs du soutien au cinéma italien actuel, basé lui-même principalement sur un système de prêts. En Suisse, en 1994, sous la pression des professionnels et grâce à l'appui du département fédéral de l'Intérieur, une grande concertation a été ouverte concernant le financement du cinéma suisse. Plusieurs phénomènes avaient en effet ébranlé cette industrie dont la baisse des moyens dévolus au cinéma suisse et aux coproductions ainsi que le retrait de la Suisse du plan MEDIA I à la suite du vote populaire contre l'entrée de la Suisse dans l'Espace économique européen (EEE). Au printemps 1993, Cinésuisse et EuroInfor (l'ancien Mediadesk) ont demandé au Conseil fédéral l'ouverture d'un crédit spécial en faveur de mesures compensatoires à MEDIA, destinées à atténuer les effets négatifs de l'exclusion de la Suisse. En 1993, ce crédit a été accordé par le Conseil fédéral et les années suivantes par les chambres fédérales. La responsabilité de ce crédit incombe à l'OFC. Le montant disponible pour les mesures compensatoires à MEDIA est de 1,96 million de francs suisses par an. Il est utilisé pour apporter une aide dans les domaines de la formation continue, du développement de projets et de la distribution/diffusion. La concertation entre pouvoirs publics et professionnels a abouti à la mise en place d'une aide automatique (prime au succès). Ainsi, depuis le 1er janvier 1997, un système d'aide au cinéma liée au succès des films a été introduit pour une période d'essai. Cette nouvelle aide est financée par la fondation culturelle Suissimage, la SSR, la chaîne à péage le Téléclub et l'Office fédéral de la culture qui se sont regroupés au sein de l'organisme Succès cinéma. Deux autres initiatives étaient également réclamées: la création d'un institut national du cinéma qui n'a finalement pas abouti et la mise en place d'un fonds de garantie, ce qui reste une priorité. Autre élément clé de cette transformation du système d'aide suisse: la mise en place d'un véritable "pacte audiovisuel" entre la Section cinéma de l'Office fédéral de la culture (OFC), la télévision publique suisse SSR et la chaîne payante Téléclub, dans le but de diversifier le financement des aides. Via le Pacte de l'Audiovisuel, la SSR contribue annuellement 9.3 million de CHF à la production audiovisuelle et cinématographique suisse [38]. Pour compléter la réorganisation du soutien à l'industrie cinématographique, l'Office fédéral de la culture s'est attelé à la révision de la loi sur le cinéma. Dans le même temps, des difficultés financières obligeaient la Fondation vaudoise pour le cinéma à revoir son système de soutien. Les modifications mises en place en 1996 répondaient à deux critères: soutenir des domaines prioritaires et proposer un système proche des propositions issues de la concertation nationale au niveau de l'OFC. C'est ainsi qu'une aide automatique était mise en place par la Fondation. Enfin, une révision du système d'aide dans la Communauté flamande de Belgique a été engagé en 1998. Des informations détaillées sur les réformes des dispositifs d'aide de l'ensemble des pays pris en compte dans le cadre de cette étude, sont disponibles dans les monographies nationales du volume II. Emergence des structures de droit privé Au plan des collectivités territoriales, une nouvelle génération de fonds semble émerger. Ils sont organisés comme des structures de droit privé et traitent contractuellement avec la télévision et/ou les collectivités territoriales. Cette situation succède à la primauté des structures associatives ou des bureaux intégrés d'administrations régionales. Dans ce domaine, les britanniques ont été les précurseurs: ce sont des sociétés de droit privé qui régissent les fonds écossais, gallois ou londoniens. Le changement paraît surtout le plus marqué en Allemagne. Après la création du Filmboard Berlin-Brandenburg en 1994, deux des régions qui avaient mis en place dès 1980 des fonds de soutien, en liaison avec la création des Filmbüro, viennent de les refondre totalement. En Bavière, le FilmFernsehFonds Bayern , société de droit privé, remplace depuis 1996 le Fonds bavarois de soutien au film et à la télévision. A Hambourg a été créée fin 1995, la Filmförderung Hamburg GmbH , également sous forme de société privée qui remplace les trois structures existant jusque-là: le fonds économique (Filmfonds Hamburg), le fonds culturel (Kulturelle Filmförderung) mis en place par le Filmbüro et le fonds de distribution (Vertriebskontor). Ce sont des sociétés privées et, à l'image du Filmboard Berlin-Brandenburg, confèrent à leur directeur un pouvoir de décision, d'investissement et de prise de risque plus proche de ceux d'un producteur. Dans le cas de ce dernier, les comités de sélection, formés de professionnels et de personnalités du Land ont disparu et la politique de soutien est de la seule responsabilité du directeur . En France, la structure Rhône-Alpes Cinéma, seule société de droit privé, apparaît pour l'instant comme une exception. Au Royaume-Uni, de nouvelles ressources disponibles grâce à la Loterie nationale Le milieu des années 90 est marqué par des changements importants dans le système de soutien britannique, à la suite de travaux du Comité Middelton achevés en juillet 1996 [39] . Des nouvelles initiatives sont apparues lors de la création du nouveau ministère du Patrimoine en 1995 avec notamment la création d'un fonds pour le cinéma alimenté par la Loterie nationale. Depuis 1995 [40] , celui-ci apporte 19,13 million d'Ecus supplémentaires par an à l'aide publique dont 16,74 million pour soutenir la production de longs métrages. Avec l'apparition de ce nouveau fonds, en 1995 le montant de l'aide publique disponible a augmenté de 173% par rapport à l'année précédente. Il faut d'abord noter une volonté politique du gouvernement britannique de l'importance économique des industries créatives. Ceci a conduit à inventer de nouvelles sources de financement pour le secteur cinématographique, et à opérer un profond remaniement de l'aide publique au cinéma. En 1997, afin de structurer plus fortement l'industrie cinématographique, un système de franchises pour la production et la diffusion de longs métrages a été mis en place. L'idée est de créer des mini-studios à l'américaine où producteurs, distributeurs et financiers sont partenaires, afin d'assurer non-seulement la production d'un film mais également sa distribution. Le Lottery Film Department du Arts Council of England (ACE) annonce qu'il dotera jusqu'à quatre groupes (ou franchises) d'une enveloppe budgétaire globale de 110 million d'ECUS, repartie sur une période cadre de six ans, pour la production de 15 à 35 films par groupe franchisé. Ce système, en aidant les structures de production à travailler sur le long terme, sur plusieurs projets, depuis leur développement jusqu'à leur distribution, devrait contribuer à donner des bases solides à l'industrie cinématographique britannique. Cette offre suscite un grand remue-ménage : les producteurs indépendants doivent se regrouper, s'allier, trouver des financiers aux reins solides. Finalement, en mai 1997, sur 37 candidats, l'ACE n'a choisit que trois : le Film ConsortiuM, DNA et Pathé. Durant les six mois suivants, les trois lauréats doivent adapter leurs structures déjà existantes et tomber d'accord avec l'ACE sur les termes exacts de leur collaboration. Les trois sociétés "franchisées" ont des profils assez différents :
Une huitaine de franchises non-commerciales se consacrant à la production de films d'art et d'essai et de courts métrages (le fonds alpha) était également prévue pour parfaire le dispositif. Cependant, ce projet a été mis en suspend, étant donné que le gouvernement a proposé de créer un Film Council qui incorporerait la fonction de distribution des fonds de la National Lottery [41] . Ce nouveau dispositif, dont il est encore trop tôt pour pouvoir mesurer l'impact économique réel, aura sans doute des effets importants sur la structuration du secteur [42] . notes
sources : Pour la partie "Comparatif des systèmes d'aides nationaux en Europe" : Les mécanisme publics d'aide au cinéma et à l'audiovisuel en Europe, Analyse comparative des systèmes d'aide nationaux, volume 1, Centre national de la cinématographie / Observatoire européen de l'audiovisuel, 199, pp.18-42. Cette étude s'appuie en grande partie sur une enquête par questionnaire effectuée en 1995.
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