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Septième art Le Septième art est une expression proposée en 1912 par Ricciotto Canudo pour désigner l' art cinématographique . Dans l'antiquité, les arts étaient symbolisés par les muses au nombre de 9:
Les "arts libéraux" étaient au nombre de sept, classés en deux groupes:
Plus tard, le terme "beaux-arts" est apparu en 1752 dans l' Encyclopédie de Diderot et d'Alembert et désignait exclusivement les quatre arts qu'on appelle plastiques de nos jours: architecture, sculpture, peinture et gravure. A noter que l'Académie des Beaux-Arts comporte aujourd'hui sept sections: les quatre beaux-arts classiques, la composition musicale, le cinéma et l'audiovisuel et une section libre. Hegel , dans son "Esthétique", classe les arts selon une double échelle de matérialité décroissante et d'expressivité croissante. Il distingue ainsi six arts, dans cet ordre:
Puis - avait-il lu Hegel entre temps ?- il ajouta la poésie comme art fondateur et écrivit «Le manifeste des 7 arts» qui a consacré l'expression «7ème art» pour le cinéma. En 1922 , il fonda la Gazette des sept arts qui est une des premières revues de cinéma. A noter que Jean Cocteau , qui appelait le cinéma la "dixième muse" a eu moins de succès. Le huitième art désigne en général la télévision , bien que les professionnels se réclament peu de cette expression. Enfin, l'expression "neuvième art" est aujourd'hui consacrée pour la bande dessinée . Son auteur en est sans doute Francis Lacassin qui publia en 1971 "Pour un neuvième art, la bande dessinée". Quant au dixième art, la place est disputée et les propositions sont nombreuses: jeu de rôle , internet , art numérique et jeu vidéo sont parmi les plus sérieuses...
La théorie des sept arts, telle que, pour la première fois, je pus l'exposer au Quartier Latin, il y a trois ans, a gagné le terrain de toutes les logiques et se répand dans le monde entier. Dans la confusion totale des genres et des idées, elle a apporté une précision de source retrouvée. Je ne m'enorgueillis pas de cette découverte, toute théorie comportant la découverte du principe qui la régit. J'en constate le rayonnement; ainsi que, en l'affirmant, j'en constatais la nécessité. Si les innombrables et néfastes boutiquiers du cinéma ont cru s'approprier le mot «Septième Art», qui rehaussait immédiatement le sens de leur industrie et de leur commerce, ils n'ont pas accepté la responsabilité imposée par le mot : Art. Leur industrie est la même, plus ou moins bien organisée au point de vue technique; leur commerce est tour à tour florissant ou médiocre, selon la hausse et la baisse de l'émot ivité universelle. Leur «art», sauf en certains cas où l'écraniste sait vouloir, et imposer sa volonté, demeure un peu partout celui qui animait Xavier de Montép in et autres [Pierre] Decourcelles. Mais cet art de totale synthèse qu'est le Cinéma, ce nouveau-né fabuleux de la Machine et du Sentiment, commence à cesser ses vagissements, entrant dans son enfance. Son adolescence viendra, bientôt, happer son intelligence et multiplier ses rêves; nous demandons à hâter son épanouissement, à précipiter l'avènement de sa jeunesse. Nous avons besoin du Cinéma pour créer L'art total vers lequel tous les autres, depuis toujours, ont tendu. Et voilà où il me faut une fois de plus expliquer, rapidement, la théorie que les milieux avertis étudient sous le nom de «Théorie des sept arts». La source retrouvée nous la révèle dans sa limpidité. Nous y voyons que deux arts, en réalité, ont surgi du cerveau humain pour lui permettre de fixer tout le fugitif de la vie, luttant ainsi contre la mort des aspects et des formes et enrichissant de l'expérience esthétique les suites des générations. Il s'est agi, à l'aube de l'humanité, de parfaire la vie en l'élevant hors des réalités éphémères, en affirmant l'éternité des choses dont les hommes s'émouvaient. On voulait créer des foyers d'émotion capables de répandre s ur toutes les générations ce qu'un philosophe italien appela «l'oubli esthétique», c'est-à-dire la jouissance d'une vie supérieure à la vie, d'une personnalité multiple que chacun peut se donner en dehors et au-dessus de sa propre personnalité. Dans ma Psychologie musicale des Civilisations (L'Homme, Psychologie musicale des Civilisations, E. Sansot, Paris, 1908), je remarquai déjà que l'Architecture et la Musique avaient immédiatement formulé ce besoin inexorable de l'homme primitif, qui cherchait à «arrêter» pour lui toutes les puissances plastiques et rythmiques de son existence sentimentale. En fabriquant sa première cabane, et en dansant sa première danse avec le simple accompagnement de la voix que cadençaient les frappements des pieds sur le sol, il avait trouvé l'Architecture et la Musique. Ensuite, il embellit la première avec les figurations des êtres et des choses dont il voulait perpétuer le souvenir, en même temps qu'il ajoutait à la Danse l'expression articulée de ses sentiments : la parole. De la sorte, il avait inventé la Sculpture, la Peinture et la Poésie; il avait précisé son rêve de perpétuité dans l'espace et dans le temps. L'Angle esthétique se posa dès lors devant son esprit. Je fais tout de suite remarquer que si l'Architecture, née du besoin tout matériel de l'abri, s'affirma très individualisée avant ses complémentaires, la Sculpture et la Peinture, la Musique, de son côté, a suivi le long des siècles le processus exactement inverse. Née d'un besoin tout spirituel d'élévation et d'oubli supérieur, la Musique est vraiment l'intuition et l'organisation des rythmes qui régissent toute la nature. Mais elle s'est manifestée d'abord dans ses complémentaires, la Danse et la Poésie, pour aboutir après des milliers d'années à sa libération individuelle, à la Musique hors la danse et le chant, à la Symphonie. Comme entité déterminante de toute l'orchestique du lyrisme, elle existait avant de devenir ce que nous appelons la Musique pure, devançant la Danse et la Poésie. Ainsi que toutes les formes sont dans l'Espace avant toute Architecture, tous les rythmes ne sont-ils pas dans le Temps avant toute Musique? Aujourd'hui, le «cercle en mouvement» de l'esthétique se clôt enfin triomphalement sur cette fusion totale des arts dite : Cinématographe. Si nous prenons l'ellipse comme l'image géométrique parfaite de la vie, c'est-à-dire du mouvement - du mouvement de notre sphère écrasée aux pôles -, et si nous la projetons sur le plan horizontal du papier, l'art, tout l'art apparaît ainsi : Des centaines de siècles humains ont jeté dans cette ellipse en mouvement leur plus haute aspiration commune, dressée toujours sur le tumulte des siècles et les bouleversements de l'âme individuelle. Tous les hommes, sous n'importe quel climat historique, ou géographique, ou ethnique, ou éthique, ont trouvé leur plus profonde jouissance, qui consiste tout simplement dans le plus intense «oubli de soi- même», en enroulant autour d'eux les spirales tenaces de l'oubli esthétique. Ce sublime oubli, on le reconnaît dans le geste du pâtre, blanc ou nègre ou jaune, sculptant une branche d'arbre dans la désolation de sa solitude. Mais, pendant tous les siècles jusqu'au nôtre, chez tous les peuples de la terre, les deux Arts, avec leurs quatre complémentaires, sont demeurés identiques. Ce que les phalanges internationales des pédants ont cru pouvoir appeler : l'évolution des Arts, n'est que logomachie. Notre temps est incomparable de vigueur intérieure et extérieure, de création nouvelle du monde intérieur et extérieur, d'engendrement de puissances jusqu'à nous insoupçonnables : intérieures et extérieures, physiques et religieuses. Et notre temps a synthétisé, d'un élan divin, les multiples expériences de l'homme. Et nous avons fait tous les totaux de la vie pratique et de la vie sentimentale. Nous avons marié la Science et l'Art, je veux dire les trouvailles, et non les données de la Science, et l'idéal de l'Art, les appliquant l'une à l'autre pour capter et fixer les rythmes de la lumière. C'est le Cinéma. L'Art Septième concilie ainsi tous les autres. Tableaux en mouvement. Art Plastique se développant selon les normes de l'Art Rythmique. Voici sa place (C) dans la prodigieuse joie que l'instinct de sa perpétuité vient d'accorder à l'homme moderne. Les formes et les rythmes, ce qu'on nomme la Vie, jaillissent des tours de manivelle d'un appareil de projection. Nous vivons la première heure de la nouvelle Danse des Muses autour de la jeunesse d'Apollon. LA RONDE DES LUMIÈRES ET DES SONS AUTOUR D'UN INCOMPARABLE FOYER : NOTRE ÂME MODERNE. La Gazette des sept arts, n°2, 25 janvier. 1923, p.2. Le texte intégral, complété d'autres écrits, est édité par les éditions Séguier (http://www.atlantica.fr/) |
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