Frédéric GIMELLO-MESPLOMB, Professeur des Universités
Centre Norbert Elias UMR 8562 UAPV - CNRS - EHESS

 
   

 

 
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LA DOLCE VITA

(Federico Fellini, 1959)


Maristella Fatichenti

Etudiante en DEUG Médiation Culturelle et Communication
(analyse réalisée dans le cadre du cours de Frédéric Gimello-Mesplomb)

Université de Metz

____________________________________

Genre : Comédie

Année : Tournage : 1959 ; sortie en Italie : février 1960

Durée : 178 min (la durée diffère parfois selon le pays de sortie).

Format : 35" Totalscope

(note : le « Total scope », mis en place en 1956 par Henryk Chroscicki, était le premier système de caméra et d'objectifs bénéficiant d'un large choix d'objectifs anamorphiques, ainsi que deux zooms. La distorsion avait été significativement réduite et la définition de l'image était excellente, ce qui rendit obsolète l'usage du cinémascope en Europe. Pendant les dix années qui suivirent, le Total scope participa à 90% des tournages et fut mis à contribution dans 450 films, parmi lesquels « La Dolce Vita »)

Réalisateur : Federico Fellini

Sujet : Federico Fellini, Ennio Flaiano, Tullio Pinelli

Scénario : Federico Fellini, Ennio Flaiano, Tullio Pinelli

Production :

•  Riama Cinematografica Cinecittà (Roma)

•  Pathé Consortium Cinéma (Paris)

Producteur : Giuseppe Amato

_____________________________

 

 

INTRODUCTION

Grand réalisateur et homme plein d'humanité, Federico Fellini a su toucher, à travers ses films, un public international. Tous ceux qui ont pu collaborer avec Fellini, l'ont toujours décrit comme un homme sensible, extrêmement cordial et très sérieux dans son travail qui, à en juger par toutes ses réalisations, s'est toujours avéré être un réalisateur à succès.

La Dolce Vita  nous révèle un monde du plaisir et de l'insouciance. Marcello, le protagoniste, est un journaliste de la critique mondaine, qui à travers un parcours extravagant, nous laisse entrevoir les coulisses sombres d'une Rome extravagante où surgissent les figures féminines fantasmagoriques.

La Dolce Vita a eu un impact impressionnant lors de sa sortie et est devenu l'un des films les plus connus du réalisateur : d'une façon très particulière, que l'on pourrait qualifier de « fellinienne », il a su aborder la société avec un regard tout à fait nouveau par rapport à son époque, sans mystères, sans jugements de valeurs ni tabous.

La Dolce Vita est un film qui ne contient pas seulement les problématiques, la vitalité et les contrastes de la société italienne dans une phase de profonde transformation, mais aussi les aspects concernant la notion de modernité du cinéma, l'éclipse du sacré, dans la société de la communication, de la mode et les nouveaux styles de vie qui se sont affirmés avec la Rome de l'ère Hollywoodienne.

 

C'était Dino de Laurentis qui devait, initialement, produire le film, mais ce dernier trouvait le scénario beaucoup trop sombre, trop pessimiste, et avait en tête une distribution « à l'américaine », avec des acteurs très connus, gage de bénéfices. Fellini a réussi malgré tout à imposer ses choix et c'est Giuseppe Amato qui a produit le film.

 

Le nom du compositeur Nino Rota et celui de Fellini sont aujourd'hui indissociables. Il sera le compositeur « fétiche » du réalisateur et composera la musique de tous les films de Fellini, jusqu'à sa mort en 1979. Le réalisateur va d'ailleurs rendre un hommage au compositeur à travers le film « Prove d'Orchestra » en 1979. Nino Rota est né dans une famille de musiciens et il s'est avéré très tôt être un excellent compositeur mais aussi un brillant chef d'orchestre. Il a composé pour le cinéma dés les années 30 et a collaboré avec des réalisateurs, tels que Luchino Visconti, Zeffirelli ou encore Francis Ford Coppola pour lequel il a composé la musique de la trilogie « Le Parrain ».

 

 

BIOGRAPHIE de FELLINI

Né à Rimini en 1920, Federico Fellini a une enfance ordinaire dans une petite ville balnéaire tranquille. L'univers artistique dans toute sa variété l'attire dés son plus jeune âge.

Il débute sa carrière comme dessinateur, alors qu'il n'avait que 15 ans et en suite en tant que journaliste, avant d'écrire, dès 1939 pour la radio et le cinéma ; c'est effectivement à ce moment là que Fellini quitte sa province pour la grande Rome.

Sa véritable carrière de cinéaste débute en 1951 avec le film « Luci del varietà » (Feux du Music Hall) où on trouve déjà sa grande passion pour le monde du spectacle : cirque, cabaret, théâtre ; on y trouvera d'ailleurs aussi des traces dans « La Dolce Vita » : notamment un spectacle de cabaret et l'apparition d'un clown.

Fellini mettra toujours beaucoup de lui-même dans ses films : il raconte sa jeunesse dans « I Vitelloni », son enfance dans « Amarcord » et dans la « Dolce Vita » il y met en partie ses propre expériences : ce n'est pas un hasard si le protagoniste du film incarne un journaliste.

Fellini a aussi collaboré avec des grands cinéastes tels Rossellini avec qui il a coécrit un des plus grands films italiens « Roma città aperta » qui a introduit en Italie un nouveau courant : le Néoréalisme.

Il faut effectivement rappeler le contexte dans lequel l'Italie se trouve à l'époque : on est en pleine seconde Guerre Mondiale les alliés débarquent en Italie le 4 juin 1944 et la libération provoque, entre autre, la naissance d'un nouveau courant cinématographique : le néoréalisme, qui a des objectifs et des moyens particuliers. Ce courant vise à un examen de conscience, envisage la réalité pour être utile à l'homme, notamment à travers l'étude de tous les problèmes de l'Italie et de l'Europe au lendemain de la guerre.

Les moyens que les réalisateurs se donnent : des décors réels, acteurs professionnels et non professionnels, une image souvent grise et sans effets techniques, des dialogues naturels, un cadrage proche de celui des actualités (caméra légère, pellicule sensible, son direct), intérêt pour les milieux populaires et les problèmes du quotidien, mise en scène à la limite de l'improvisation.

Fellini est à première vue héritier de ce courant, dans ses premiers films, par exemple, il tourne toujours en décor naturel, mais avec « La Dolce Vita » il "Maestro" rompt avec l'école néoréaliste : au début le film devait être la suite de « I Vitelloni » et de son personnage principal « Moraldo », et devait s'appeler « Moraldo in città », mais réalisateurs se sont aperçus que le public pouvait ne plus être intéressé par la vie d'un provincial ; c'était le début du boom économique et l'Italie était devenu un pays prospère, le cinéma avait aussi prospéré et Rome devenait une sorte d'Hollywood. Les réalisateurs s'engagent alors dans un nouveau projet : l'histoire d'un journaliste qui allait découvrir la Rome de l'argent et de la décadence. En s'intéressant, donc, à un milieu social aisé, voie aristocratique, en utilisant des acteurs célèbres et un décor entièrement reconstruit en studio, le film n'a en effet a priori que peu de rapport avec le néoréalisme. Fellini à ce propos dit que malgré sa collaboration avec Rossellini, il n'a jamais été influencé par son néoréalisme. Si Rossellini revient de l'expression documentaire, Fellini, lui, se dirige vers une expression spectaculaire et onirique.

Pourtant « La Dolce Vita » nous propose tout de même une réalité qui n'est pas corrigée en fonction de la psychologie et des exigences du drame, et qui est toujours proposée comme étant une découverte singulière

Fellini tournera par la suite beaucoup d'autres films : entre 1951 et 1990, il aura tourné 24 films, tous teintés d'un réalisme onirique.

Fellini meurt le 31 octobre 1993 à Rome. Tous les plateaux de tournage ont gardé une minute de silence en sa mémoire.

 

 

SYNOPSIS

La Dolce Vita est l'histoire singulière de Marcello Rubini (Marcello Mastroianni), journaliste de chronique mondaine, souhaitant devenir, un jour, un écrivain sérieux.

Pendant sept nuits et sept jours, il devient le guide d'un voyage à travers la "dolce vita" romaine. On le rencontre, au début, en hélicoptère, suivant le transport de la statue du Christ qui survole les rues et les terrasses de Rome. Le soir, dans un night club, Marcello rencontre Maddalena (Anouk Aimée), une jeune héritière toujours à la recherche de nouvelles sensations, avec laquelle il finit par faire l'amour dans le lit d'une prostituée consentante. Revenu à la maison à l'aube, Marcello trouve sa compagne, Emma (Yvonne Fourneau), qui a essayé de se suicider par jalousie. Il la fait hospitaliser, mais il doit immédiatement courir à l'aéroport où est en train d'arriver Sylvia (Anita Ekberg), une fameuse diva du cinéma hollywoodien. Marcello va la suivre partout, à la recherche d'un moment favorable qui n'arrivera jamais : après un bain sensuel dans la fontaine de Trevi (scène mythique du cinéma italien), les deux personnages retournent à l'hôtel où ils sont giflés par le mari de l'actrice. Entre temps, les litiges avec Emma continuent et Marcello rencontre un ami intellectuel, Steiner, dont il admire la famille (qui représente pour lui une vie idéale). Steiner, au contraire, va finir par se suicider après avoir tué ses enfants.

Le travail de Marcello va ensuite l'amener à suivre un épisode de fanatisme collectif autour du cas de deux enfants qui inventent avoir vu la Madone : un épisode d'ailleurs qui va se terminer assez tragiquement, par la mort d'un handicapé sous une pluie torrentielle.

La tourmente continue : Marcello participe un soir à une fête organisée par des nobles dans un château et là il déclare ouvertement son amour à Maddalena, mais finit par coucher dans le château avec une femme mûre. Les événements existentiels de Marcello se poursuivent sans arrêt : son vieux père, venu lui rendre visite, est pris d'une attaque cardiaque chez une prostituée et Emma l'abandonne.

On retrouve Marcello à la fin comme au début : un soir dans une villa pour une « surprise-party » qui dégénère : à l'aube, les participants fatigués et encore souls se rendent sur la plage où ils assistent à la pêche d'un énorme poisson. Là, Marcello est salué par une jeune femme innocente, une jeune fille connue auparavant dans un restaurant, mais, absorbé par ce qu'il croit être sa destinée, il ne la reconnaît pas et n'entend pas ses paroles.

 

 

 

INTERPRETES


Il faut absolument s'arrêter quelques moments sur le personnage de Marcello, car il est la clé de l'histoire.

Marcello est le « héro » de la Dolce Vita, familier des lieux chics et branchés, il est un guide précieux pour le spectateur car c'est grâce à lui qu'on pourra découvrir les coulisses des nuits romaines, lien vital entre les différentes histoires qui parcourent le film.

Marcello est en quête permanente de sensations, en évitant soigneusement tout ce qui pourrait ressembler à un début d'engagement. Il est toujours à la mode dans sa petite voiture de sport circulant dans les rues tortueuses et mondaines de Rome, contrairement à son appartement qui reste toujours vide, sans décorations, à peine meublé, et qui est peut être une expression de son indifférence spirituelle. Quand Marcello écrit, il ne le fait que dans des cafés ou restaurants vides, quand il fait l'amour, il n'arrive à le faire que dans des endroits sordides. Ses femmes ne sont que des fantasmes transitoires, des ombres dans la nuit.

C'était Paul Newman qui devait, à l'origine, incarner ce personnage mais Fellini a personnellement sollicité Marcello Mastroianni, car ce dernier avait la chance d'avoir un visage malléable, plastique, pouvant évoluer au cours des scènes. Si l'on revient sur les intentions formulées par Fellini : «  J'ai besoin d'un visage ordinaire, de traits sans personnalité, sans expressions, une gueule banale quoi, comme la votre  ». Heureusement le comédien ne s'est pas vexé, au contraire. Marcello Mastroianni devient, à partir de la Dolce Vita, l'acteur fétiche de Fellini. Il va d'ailleurs interpréter beaucoup d'autres films du réalisateur : Otto e Mezzo, Fellini Roma, Intervista .

 

Parmi les autres comédiens de « La Dolce Vita » on relève la présence notable de :

Anita Ekberg, actrice suédoise fabuleuse dans le rôle de la pulpeuse star hollywoodienne. Anita va beaucoup s'attacher à Fellini et à l'Italie, qui deviendra par la suite sa « patrie adoptive ».

Anouk Aimée, qui tient le rôle de Maddalena. L'actrice va incarner d'autres rôles dans plusieurs films de Federico Fellini.

Magali Noël, qui incarne "Fanny", la danseuse de cabaret.

Yvonne Fourneau, comédienne française alors peu connue : elle interprète le rôle d'Emma, la compagne délaissée de Marcello. Emma est certes un peu obsessive mais elle est l'un des seuls êtres positifs du film : elle s'aperçoit que l'amour réside dans les choses simples.

On peut remarquer aussi deux curiosités dans la distribution des rôles :

Lex Barker, qui incarne le mari de Sylvia dans le film, est représenté comme un acteur ayant eu une certaine gloire dans le passé après avoir interprété « Tarzan » dans un film à Hollywood, ce qui reflète partiellement la vraie carrière du comédien, qui avait eu un certain succès dans le temps en interprétant, à deux reprises, le rôle de Tarzan. Faut-il y voir une clin d'oeil de la part de Fellini aux films de son enfance ?

Adriano Celentano incarne dans le film une star de la chanson rock. Le chanteur n'était en réalité pas encore très connu, mais il est devenu par la suite l'un des chanteurs italiens les plus populaires.

 

 

LA RECEPTION

La Dolce Vita fut un véritable phénomène de société qui déclencha de nombreuses polémique. Le film obtint un très grand succès commercial, à un tel point que l'expression « Dolce Vita » passa dans le langage courant.

Quand Fellini a présenté son film en février 1960, au « Capitol » de Milano, dans la salle ce sont des huées qui ponctuent les aventures de Marcello.

L'église se montra violemment hostile au film. Fellini avait en effet tourné auparavant trois films sur la province, la jeunesse et le spectacle, trois films chrétiens consacrés à la rédemption (« La Strada », « Il Bidone »). Fellini était à ce moment un cinéaste célébré par le Vatican. Les milieux catholiques conservateurs et la presse de gauche, au contraire, l'attaquaient vivement. Fellini réalise avec la « Dolce Vita » un hallucinant enfer social prenant à contre-pied les icônes de la religion et de la morale :

 

•  une statue géante de Jésus, se balance sous un hélicoptère au dessus de la place St Pierre (générique du film).

•  une star américaine extravagante, déguisée en prêtre, gravit les marches de St. Pierre et se baigne dans la fontaine de Trevi. Le costume de prêtre était très moulant et l'actrice beaucoup trop bruyante dans un lieu de recueillement. Elle donne par ailleurs dans la fontaine un baptême très païen à Marcello.

•  des enfants font courir les foules pour un faux miracle

•  le sexe n'est plus qu'une mécanique, il ne recouvre plus de sentiments.

•  Un intellectuel vide se suicide après avoir tué ses enfants.

•  Les fêtes se terminent dans une villa où une jeune femme fête son divorce

•  Fellini nous montre un poisson mort sur la plage, symbole de la mort de la religion : on sait que le poisson est le symbole du Christ dans l'imagerie chrétienne, dû au fait que le mot « poisson » en grec se lit « IXTHUS », mais c'est aussi l'anagramme de « Jésus Christ Fils de Dieu Sauveur ».

 

Federico Fellini a donc été vu comme un immoral et on a assisté à un renversement des tendances : tous ceux qui l'avaient jusque lors soutenu l'ont condamné et vice versa.

Un cardinal qui avait soutenu « La Strada » de Fellini, demanda qu'on lui retire son passeport. Le journal officiel du Vatican « L'Osservatore Romano » mena une campagne, en vain, pour que le film soit interdit. Le Vatican avait même demandé l'ex-communication pour ceux qui allaient voir le film, qualifiant ce film d'infâme et d'obscène.

Fellini raconte que sur la porte de certaines églises était écrit «  Prions pour le salut de l'âme de Federico Fellini, pêcheur public  » ; et la mère du réalisateur, vivant toujours à Rimini, fut accusée d'avoir enfanté un monstre blasphémateur.


Le film suscita également des réactions aussi dans le monde politique : à la chambre des députés, des parlementaires parlaient de « l'offense faite à la vertu et à la probité de la population romaine ».

Malgré cela, même dans le milieu ecclésiastique, il y eut des prêtres, comme le père jésuite Angelo Arpa, qui ont défendu le film à sa sortie. Le père raconte de s'être rendu auprès du directeur de l'Osservatore Romano pour défendre les qualités du film : « Je lui demandais s'il avait vu le film ; il me répondit que qu'il n'était pas nécessaire de voir des cochonneries pour les condamner », ceci explique à quel point les gens étaient arc-boutés sur leur position et ceci notamment à cause des convictions de la société italienne et romaine en particulier, dans laquelle la religion est profondément enracinée.

 

Le critique italien Gian Luigi Rondi écrira dans « Il Tempo », du 5 février 1960:

La Dolce Vita n'est finalement que le constat d'une vie désenchantée : la mort est là, en trame omniprésente, le temps qui passe et le questionnement de l'existence sous-entendus en permanence. Un film qui voit, dans les chroniques mondaines de la période du miracle économique, les signes contraires d'une crise radicale de la société. (traduction de l'italien) 

 

Si la projection de février 1960, au « Capitol » de Milano, avait été houleuse, en revanche, celle organisée au Festival de Cannes permet au film de rencontrer un grand succès. George Simenon, président du jury, a soutenu le film (développant par la suite une très belle amitié avec le réalisateur). Le film se voit décerner la « Palme d'Or » le 20 mai 1960.

 

D'autres prix ont suivi :

 

•  trois "Rubans d'Argent" décernés par « Il Sindacato Nazionale Giornalisti Cinematografici Italiani » (Le syndicat national des journalistes cinématographiques italiens), pour : le meilleur sujet original, le meilleur acteur protagoniste et le meilleur scénario.

•  Oscar du meilleur costume en noir et blanc, attribué aux Etats-Unis.

•  « David di Donatello » pour la meilleure réalisation en 1960

•  Nomination au BAFTA ( British Academy of Film ans Television Art Awards) pour le meilleur film

•  Nomination à l'Oscar du meilleur réalisateur, meilleur sujet et scénario (Fellini, Flaiano, Pinelli et Brunello Rondi) en 1961

 

Le film a connu par la suite un vrai succès mondial : il avait coûté au départ 600 millions de £ (équivalents à 300.000 € courants) et il a rapporté plus de 2 milliards de £ uniquement en Italie. Malgré la polémique, le film a battu le record de « Autant en importe le vent », première au box office de l'époque en Italie.

Le film sortira dans beaucoup d'autres pays : en France (le 11 mais 1960), en Allemagne, en Danemark, en Portugal, en Yougoslavie et en Angleterre.

Le film est sorti aussi aux Etats-Unis, le 19 avril 1961, où il a enregistré un gain de 19,5 millions de $.

 

Il y a une comparaison, concernant le film, qui le résume plutôt bien : La dolce Vita a été comparée à l'Enfer de Dante Alighieri, « Marcello serait un peu comme Dante, pèlerin, dans l'Enfer de la Divine Comédie, qui parcourt les sept cercles de l'Enfer, et fait la découverte de tous les vices, sur fond de décadence d'une ville ».

En fait, c'est cette peinture d'une société décadente qui heurta les esprits à l'époque, les gens se sont senti visés, elles n'y voyaient qu'une critique directe, ils n'avaient pas compris que Fellini reproduisait aussi dans son film des stéréotypes et mettait en scène une société caricaturale (même si il avait tout de même pris l'inspiration de sa propre expérience).

Fellini nous dresse le portait d'une société romaine superficielle, désoeuvrée, crevant d'ennui et ne songeant qu'à s'étourdir dans des fêtes à répétition. Il la peint par touches successives, sans suivre la logique traditionnelle du récit, mais en filmant simplement différents personnages et différentes histoires, toutes pivotantes autour de Marcello.

Beaucoup ont eu peur, en fait, de ce qu'ils lisaient entre les lignes, La Dolce Vita n'était-elle pas avant-gardiste, annonciatrice de la décadence du monde moderne ?

Aujourd'hui le film n'est plus du tout perçu de la même manière et il n'est surtout plus objet de scandale, notamment si on le compare avec nombre de films ultérieurs.

On y retrouve de l'humour que l'on ne percevait pas à l'époque, car le film se veut souvent très ironique, mais aussi sombre et grave sur la société du spectacle et des médias. A ce sujet il y a une petite curiosité à remarquer, concernant le mot « Paparazzi »   :

 

Le nom paparazzo est une notion qui est rentrée dans le vocabulaire international grâce au film. Le scénariste Ennio Flaiano, avait trouvé, dans un livret d'Opéra, le mot paparazzo qui était un personnage d'Opéra, mais qui faisait penser aussi à "parazzeo", un mot qui veut dire "moustique" ce qui renvoyait justement à l'idée de ce genre de photographes qui étaient effectivement un peu comme des moustiques, très collants et toujours prêts à harceler les humains. On entend d'ailleurs Emma, dans la scène du « faux miracle » les qualifier « d'êtres méprisables » ou encore, à plusieurs reprises, Maddalena qui dit «  N'en ont-ils jamais marre de prendre des photos ?  ».

Fellini va même se faire aider par de vrais journalistes, qui à l'époque ne s'appelaient pas encore paparazzi, pour mieux reconstituer des scènes, qui s'étaient déjà plus ou moins passées dans la réalité.

 

Fellini a toujours revendiqué une totale subjectivité dans ses films, pour affirmer justement, qu'il donne une vision toute personnelle des sujets qu'il aborde.

Dans un extrait du recueil « Les propos de Fellini » de 1972, Fellini nous dit à propos de la Via Veneto, représentée dans le film en tant que rue principale, lieu par excellence de la vie mondaine : «  J'ai inventé dans mon film une via Veneto qui n'existe pas du tout, que j'ai élargie et modifié, jusqu'à ce qu'elle prenne la dimension d'une fresque allégorique ».

Ce qui est drôle c'est que, par la suite, la via Veneto s'est réellement transformée pour devenir telle que Fellini l'avait représentée dans son film. Les photographes s'y multiplièrent et les starlettes en quête de publicité s'y promenèrent en chemise de nuit.

 

Il faut aussi ajouter le fait que Fellini ne juge pas les personnages, il ne préjuge pas les mours observées et il ne propose pas de remède, mais il peint une société sans voiles où les personnages, malgré l'agitation des fêtes mondaines, malgré les événements tristes et tragiques, tendent à l'immobilité. A force d'en avoir trop vu, le personnage principal finit par regarder sans voir : notamment à la fin du film, on verra Marcello sur la plage qui regarde une jeune fille lui souriant, mais il ne la reconnaît pas, il ne l'entend pas, pourtant il lui sourit sans trop savoir pourquoi et il lève les mains au ciel comme pour dire que ce n'est pas grave, que c'est la vie, peu importe de ne pas comprendre. Marcello continue sa vie, insouciant ; la grâce, il aurait pu la trouver avec cette fille au visage angélique, qui lui avait conseillé la joie simple de l'écriture mais Marcello est finalement devenu insensible au sourire de la vie.

 

 

 

ELEMENTS ESTHETIQUES


La couleur

La Dolce Vita est un film en noir et blanc. Fellini avait toujours filmé jusque là en noir et blanc, car à l'époque le coût d'un film en couleur était assez élevé. La première réalisation en couleur de Fellini date de 1962 avec le film « Les tentations du docteur Antonio ».

 

La musique

La musique n'est pas omniprésente comparativement à d'autres films de la même époque. Bien souvent, pour accompagner de dialogues, seuls les bruits de la rue servent de fond sonore : dans la scène de l'invraisemblable dispute entre Marcello et Emma, on entend effectivement aucun fond musical, sinon celui produit par le vent et les voix des deux personnages.

C'est surtout lors des soirées d'extravagance et de folie, qui parsèment le film, que la musique est présente, mais c'est une musique diégétique, qui provient de la chanson « Reddy Teddy » de Adriano Celentano à la soirée aux Termes de Caracalla en présence de la diva hollywoodienne, ou à travers le chant d'une femme orientale lors d'une soirée chez Steiner, l'ami intellectuel de Marcello. Ou encore, elle provient d'un tourne-disque lorsque Marcello écrit seul dans un restaurant vide, près de la plage.

La musique est, en tout cas, toujours accompagnatrice des actions, elle suit le rythme joyeux et amusant des fêtes, la tension d'une bagarre entre deux hommes, le long de la via Veneto, ou encore la douceur des pas de Sylvia lorsque elle marche dans la nuit, dans les ruelles désertes de Rome, avant d'arriver à la Fontaine de Trevi, où la musique s'arrête comme pour faire apprécier encore davantage la splendeur de l'image.

La musique ne joue donc pas sur un contraste avec la force de l'image, comme dans le cas du film « Nuit et brouillard » (Alain Resnais, 1955), dans lequel la violence est accompagnée d'une musique douce. Ici, au contraire, c'est une mélodie qui accompagne les sentiments et réveille les sensations qui peuvent naître des images.

 

 

 

Maristella Fatichenti

Etudiante en DEUG Médiation Culturelle et Communication

Université de Metz