Ce sont les réponses à cette question qui vont me permettre :
d'orienter mon travail et de le planifier ;
de canaliser mon effort ;
de définir la méthode efficace :
- pour préparer.
- et pour réaliser l'exposé.
C'est-à-dire de ne pas me lancer tête baissée dans un travail démesuré et inutile.
Quelle que soit la situation, la réussite d'un exposé s'évalue selon trois critères :
Etre écouté.
Être compris.
Laisser une trace.
Etre écouté est loin d'être automatique ; il est difficile de se faire comprendre ; souhaiter que l'auditoire ait retenu quelque chose de son exposé relève en réalité d'une grande ambition. Tout le travail de préparation de l'exposé doit tenir compte de l'ordre réel des priorités :
La priorité n° 1 est d'être écouté : si tel n'est pas le cas, on n'a
de toute manière aucune chance d'être compris, encore moins
de faire retenir quoi que ce soit.
La priorité n° 2 est l'intelligibilité de son propos : rien ne sert
de vouloir convaincre, ou briller, si l'auditoire n'a rien compris,
ou a compris autre chose que ce qu'on a cru exprimer.
Or l'erreur commise par les orateurs inexpérimentés consiste toujours à privilégier dans sa préparation les aspects les plus sophistiqués, perdant de vue qu'il faut s'employer d'abord à assurer la force, la simplicité et la clarté du propos.
A chacun de ces trois critères correspondent des implications pratiques.
1. Être écouté implique
une parole audible. Ceux qui écoutent ne doivent avoir aucun effort à faire pour saisir ce qui est dit. Prononciation molle ou petite voix timide et rentrée, texte lu à toute vitesse : autant de défauts qui rendent impossible l'écoute attentive de l'exposé. Celui qui fait l'exposé a l'initiative : c'est à lui de faire tous les efforts. Il sera payé de retour par l'attention qui lui sera portée.
un rythme approprié. Si l'on souhaite que l'auditoire « suive », il faut maîtriser son rythme de parole. Il est facile de parler vite : le rythme de l'écoute est beaucoup plus lent. Si l'on souhaite, de plus, que l'auditoire comprenne, il lui faut des temps de respiration pour évoquer ce qui a été dit ou montré, rattraper quelques secondes d'inattention, ou rétablir un mot mal compris.
de la présence. Qu'elle soit fondée sur l'enthousiasme, la conviction ou l'autorité, elle manifeste l'importance qu'on donne à son échange avec l'auditoire. Elle induit, par mimé tisme, l'attitude de ceux qui écoutent. À orateur amorphe, salle apathique ; à orateur vivant, auditoire intéressé.
2. Etre compris implique
- que le message soit le plus simple possible.
- Parce qu'il est unique (toute la démonstration converge vers
une idée, qui constitue l'essentiel de ce que l'orateur veut
faire comprendre ou admettre) ;
- Parce que les différents sont organisés et articulés entre
eux d'une manière cohérente : le « fil » est aisé à suivre ; il
est manifeste, logique ; il est animé par un raisonnement (et
non par la seule juxtaposition d'idées ou de remarques).
- que les idées soient illustrées.
- Peu d'entre nous comprennent d'emblée une idée abstraite ou générale. Pour en saisir la portée, ils doivent pouvoir se représenter le pourquoi et le comment. Chaque idée, pour être intelligible, doit donc être étayée par une illustration verbale (un exemple) ou visuelle (une photo, un dessin, une maquette, un échantillon, etc.).
Le choix et le traitement des illustrations constituent une part importante de la préparation de l'exposé.
3. Laisser une trace
implique d'avoir apporté un bénéfice à l'auditoire :
II a appris quelque chose d'intéressant ;
il a vu le sujet sous un angle auquel il n'avait pas pensé auparavant ;
ce qu'il a entendu déclenche sa propre réflexion.
Qu'on fasse un exposé pour informer ou pour convaincre, il est essentiel d'organiser sa préparation en fonction de cette notion de « bénéfice-auditoire ». Il faut donc songer à :
apporter du nouveau ;
trouver le bon « angle » de présentation ;
alimenter l'imagination de ses interlocuteurs. Si l'on souhaite
que la réflexion puisse se prolonger au-delà de l'exposé, il faut
fournir à l'auditoire des supports d'évocation capables de
s'intégrer au « cinéma intérieur » de chacun.
Le « cinéma intérieur » des auditeurs existe de toute manière : il prolonge ou contredit le propos de l'orateur, et bien souvent s'en échappe (on se met à penser à autre chose). Un exposé efficace est celui qui sollicite le cinéma intérieur de chacun de manière convergente. Il fournit à l'imagination des sujets capables de servir le propos de l'orateur.
Ce sont ces évocations, suscitées par l'exposé, mais reprises par chacun de manière personnelle, qui peuvent constituer dans le temps la trace de l'exposé. Le lendemain ou quelques jours après c'est par elles qu'on retrouve le fil du propos, et qu'on peut continuer à y réfléchir.
CE A QUOI UN AUDITOIRE SOUHAITE ÉCHAPPER
- A un exposé interminable : «J'ai encore beaucoup à dire », soutient l'orateur devant des rangs apathiques, résignés... ou clairsemés. Chacun ne songe plus qu'à la manière dont l'exposé prendra lui, et prie le ciel que quelqu'un (modérateur ou profes seur, président de séance) intervienne énergiquement.
- A un discours qui ne passionne que celui qui le fait : pris par son sujet, l'orateur enchaîne faits et commentaires à un rythme endiablé, considérant que " tout est dans tout" et inversement = Tout le monde a "perdu le fil" et décroche.
- A la lecture d'un texte sans intérêt ni apport personnel : on frémit à la vue du nombre de pages qu'il reste à tourner...
- Au maniaque des aides visuelles, qui présente - en moyenne - un transparent à la minute ; transparents si chargés par ailleurs qu'il faudrait un bon moment pour les lire : c'est d'autant plus impossible que l'orateur continue à parler à jet continu.
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Je cherche à convaincre.
Je me pose trois questions :
- Quels sont les à priori possibles sur le sujet ?
en distinguant :
-ceux qui peuvent faciliter ma tâche ;
-ceux qui s'opposent à mon message.
- Quels sont les freins à lever (dans l'univers considéré) ?
- Quelles sont les motivations sur lesquelles je pourrai m'appuyer ?
La construction de l'exposé devra mettre en avant :
Les éléments qui permettent d'établir un accord avec l'auditoire (ils n'apportent rien de nouveau, mais créent un climat d'entente).
Les faits nouveaux (ou les réflexions) capables d'êtres « en
phase » avec les motivations de mon auditoire, et/ou de
combattre ses inquiétudes, son apathie, sa méfiance.
MOI
La question essentielle est : en quoi suis-je concerné ?
Je peux être concerné :
par le sujet,
ou par l'objectif,
ou par les deux ;
mais il est essentiel que je le sois.
Si je me contente de réaliser un exposé parce qu'il le faut, sur un sujet qui m'indiffère, je ne suis pas en situation de pouvoir communiquer quoi que ce soit à l'auditoire - même des informa tions ou des connaissances. Accepter de faire un exposé, c'est accepter d'assumer son rôle et d'adhérer à la situation. Comment ?
a) En se passionnant pour le sujet.
Deux cas de figure sont possibles :
ou bien l'exposé consiste à présenter ses propres travaux ;
l'intérêt qu' on leur porte va de soi. Encore faut-il envisager avec
un certain recul les différentes étapes qui ont permis de parvenir
au résultat, pour apprécier les difficultés qu'on a pu surmonter,
les chances qu'on a eues, la portée des échecs et des succès ;
ou bien l'exposé est l'occasion de traiter un sujet qu'on connaît
peu : le propos consiste à réunir des informations et à en tirer
l'essentiel pour le présenter à l'auditoire. C'est en travaillant
son sujet qu'on parvient peu à peu à s'y intéresser vraiment. Ce
sont les faits moins connus, les détails insolites ou touchants,
l'approfondissement des techniques utilisées, qui vont retenir
l'attention, et donner au thème une couleur ou un relief inattendus.
En travaillant son sujet, on s'y intéresse, et on peut parvenir à intéresser les autres
b) en mobilisant ses efforts vers l'objectif.
. Soit parce que le résultat visé est très important :
-c' est le cas lors d'un examen ou d'un concours ; obtenir la
meilleure note possible constitue normalement un objectif
motivant,
-c'est le cas lorsqu'il s'agit d'emporter une décision dans
laquelle on se trouve directement impliqué ;
. soit parce qu'on introduit dans la situation d'exposé une notion
de défi à relever ; sont alors en jeu la curiosité à l'égard du
résultat, l'évaluation de ses propres capacités et des réactions
de l'auditoire, les leçons à tirer ultérieurement de l'expérience
réalisée.
UNE CONSTRUCTION PRATIQUE
Le lieu.
De quel matériel puis-je disposer ? De la réponse à cette question dépend la conception et le style des illustrations auxquelles je peux songer :
. Je dispose d'un papier-calque, d'un rétroprojecteur, ou même
d'un simple tableau ; je parlerai devant trente personnes ou
moins :
= je vais rechercher ce que je peux montrer.
. Je ne suis sûr d'aucun matériel, et je ne connais pas la
configuration de la salle
= je travaillerai mes exemples et mon texte pour les rendre les
plus évocateurs possible.
. Je dispose d'aides visuelles spectaculaires
= je réfléchis à la meilleure synergie parole/image.
Le temps.
Quel est le temps imparti ?
De la réponse à cette question dépend la conception générale de l'exposé et son découpage. Ce n'est pas du tout la même chose de devoir parler cinq, vingt minutes ou une heure. Dans tous les cas, c'est à l'exposé de rentrer dans le cadre temporel qui a été fixé : par courtoisie vis-à-vis de l'auditoire, et
parce qu'on ne peut pas prendre le risque d'être coupé avant d'avoir conclu (comme cela se pratique dans les congrès inter nationaux, où le respect du « timing » est, ajuste titre, impératif).
DUREE ET ORGANISATION D'UN EXPOSE
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Exposé de cinq minutes :
- Peu ou pas d'introduction.
- Une seule idée.
- Au moins deux minutes d'illustration.
- Conserver une minute pour conclure.
-
Exposé de vingt minutes :
- Introduction : trois minutes environ.
- Deux ou trois séquences de cinq minutes environ.
- Conserver trois à cinq minutes pour la conclusion.
- Exposé d'une heure :
- Introduction + présentation du plan de l'exposé sur transparent (auquel l'auditoire pourra se référer en permanence).
- Première partie, elle-même constituée de séquences de trois à cinq minutes.
- Conclusion de la première partie. Retour au plan général de l'exposé et annonce de la deuxième partie.
- Deuxième partie, éventuellement troisième partie,
construites comme la première partie, en séquences de trois à
cinq minutes.
- Conclusion générale (cinq minutes) : reprise des conclusions
d'étape + synthèse des spects positifs, intéressants, nouveaux + perspectives.
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UNE CONSTRUCTION INTERESSANTE
Elle doit être conçue pour :
Accrocher l'intérêt.
Soutenir l'intérêt.
Prolonger l'intérêt (laisser une trace).
a) Accrocher l'intérêt.
C'est l'affaire des premières minutes de l'exposé :
Exposé rapide : entrer tout de suite dans le vif du sujet.
Exposé long: L'introduction annonce la démarche qui sera
suivie.
Dans tous les cas, éviter les phrases de départ :
générales (« Je vais vous parler
d'un sujet qui me tient à cour... ») ;
conventionnelles ou banales (« De tout temps, on s'est interrogé
sur... »).
Rechercher plutôt :
l'insolite ou le surprenant : « 250 kg d'ordures par an et par
personne : le volume des déchets ménagers implique aujourd'hui de prendre des décisions énergiques... » ;
le lien avec l'auditoire : avec une précédente intervention, avec
les préoccupations quotidiennes de chacun...
b) Soutenir l'intérêt.
C'est l'affaire :
Des changements de séquence évoqués plus haut.
De l'alternance : idée/exemple ; parole/illustration ; abstrait/concret.
Des aides visuelles, si elles sont bien utilisées.
POUR LA CONTRUCTION D'UN EXPOSÉ DE DIX MINUTES
- Réfléchir aux quatre questions suivantes, noter la réponse par écrit
de manière très concise :
- Quels sont les faits principaux ? (les noter sur une fiche de
manière sèche, sans faire de phrases).
- Que peut-on en tirer ?
- En quoi est-ce intéressant pour l'auditoire ?
- Qu'est-ce que je veux démontrer ? (aboutir à une seule phrase ; la rédiger : ce sera la "phrase-message"
- L'organisation des séquences
- Faire un schéma de développement à partir de la phrase-message = 2 séquences de démonstration de 3' chacune avec 1 phrase-clef ou 1 illustration
- Dans chacune des deux séquences, introduire 1 "trouvaille verbale" (mot ou expression) et 1 support d'évocation visuelle (portrait, couleur, etc...)
- L'introduction de l'exposé (3 ou 4 phrases)
- Sélectionner un aspect nouveau (d'actualité) ou insolite, ou proche de l'auditoire
- l'utiliser pour concevoir l'introduction
- rédiger la première phrase
- La conclusion ( 3 ou 4 phrases)
- Synthèse rapide des deux séquences
- Reprise de la "phrase-message"
- Une phrase sur les persectives (la rédiger)
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Extraits de Pour réussir un exposé, collection "méthode Plus", Editions du Rocher, 1991. 48p.